Le maintien à domicile d’une personne âgée en perte d’autonomie requiert une bonne organisation. Or, les familles sont souvent dépourvues face à un univers qu’elles connaissent mal. Un nouveau métier est récemment né afin de les aider à trouver des solutions pour garantir le bien vieillir à domicile. Clément Charcellay, conseiller grand âge chez Autonomia, nous explique en quoi consiste cette nouvelle profession des services à la personne.

Conseiller et diagnostiquer pour organiser le maintien à domicile

Cap Retraite : Pouvez-vous vous présenter et nous expliquer quelle est votre fonction au sein d’Autonomia ?

Clément Charcellay : Bonjour, je suis conseiller grand âge Autonomia à Nice, où j’accueille du public le mardi et le jeudi. Je me déplace également au domicile, pour conseiller, coordonner et octroyer l’ensemble des services nécessaires au maintien à domicile des personnes en perte d’autonomie.

CR : En quoi consiste la fonction de conseiller grand âge ?

CC : Notre rôle est, en premier lieu, de conseiller la personne âgée et de mettre en place tout ce qui est nécessaire à son maintien à domicile. Il s’agira des services que nous connaissons tous : aides ménagères, auxiliaires de vie, infirmiers ou kinés, mais aussi de tout ce qui concerne les loisirs et le bien-être pour que la personne bénéficie des meilleures conditions de vie.

Parallèlement, nous diagnostiquons tout ce qui touche à l’équipement du domicile. Nous allons donc vérifier si celui-ci correspond aux besoins de la personne, mais aussi à son bien-être. Il peut s’agir de la salle de bain, avec par exemple l’installation, au minimum, de tout le matériel de sécurité pour les toilettes. Nous pouvons aussi être amenés à proposer de changer une baignoire pour une douche.

Nous allons aussi conseiller et diagnostiquer sur les aides financières possibles pour la personne et sur sa situation juridique. Nous vérifions les démarches à accomplir pour anticiper d’éventuels soucis, par exemple si la personne a bien désigné une personne de confiance.

Ce processus est effectué dans le respect de la personne et surtout de ses souhaits. Nous n’allons pas imposer de changements qui ne sont pas voulus. Nous allons toujours préciser ce qu’il est recommandé de faire dans le meilleur des cas. Mais, si cela ne lui convient pas, on essaiera de trouver une autre solution. S’il n’y en a pas de satisfaisante, cette personne ne pourra pas rester à son domicile et nous serons amenés à l’orienter vers une solution différente, comme un accueil en Ehpad.

Après ce diagnostic-conseil, nous mettons en place tous les services choisis avec la personne âgée. Cela peut être l’intervention d’infirmiers, de kinés et de services à la personne. En parallèle, nous allons coordonner tous ces services, toujours en relation soit avec la personne au domicile, soit avec elle et ses aidants. Dans tous les cas, nous sommes là pour vérifier que tout fonctionne et pour effectuer des ajustements au besoin.

Un conseiller Grand Âge se rend à domicile pour évaluer les besoins des seniors

CR : Vient-on vous voir directement ou peut-on vous contacter à distance ?

CC : Les deux cas sont possibles. La prise de contact peut être effectuée par téléphone, par email, via notre site Internet ou directement dans mon cabinet.

Ensuite, je me déplace toujours au domicile pour effectuer un diagnostic. Je vais en effet vérifier si la personne peut rester y vivre, sur le long terme, et, si c’est le cas, dans quelles conditions.

Faire face à la perte d’autonomie avec un soutien approprié

CR : Que vous demandent le plus souvent les familles lorsqu’elles viennent vous voir ?

CC : Au début, la famille veut principalement de savoir où la personne en est. Cette dernière est confrontée à une situation de dépendance souvent imprévue, suite à un problème de santé ou à une chute. Cette « arrivée dans le monde de la dépendance » est malheureusement ce qui arrive le plus fréquemment. La famille ne sait pas du tout comment faire pour lui permettre de rester à domicile. Elle se demande ce qu’il faut mettre en place, quelle société contacter, ou encore quelles sont toutes les aides possibles, à la fois financières et matérielles.

Il existe une autre forme de demande. Il s’agit du cas d’une personne en situation de dépendance depuis de nombreux mois, voire années. Elle est aidée par des enfants, de la famille ou des amis. Mais, malheureusement, tous ces aidants arrivent à la limite de ce qu’ils peuvent faire. Parfois surtout, cela devient dangereux pour eux mentalement, c’est ce qu’on appelle la « charge mentale. Des aidants vont donc nous contacter en nous confiant qu’ils sont saturés et ont besoin de soutien.  

CR : Depuis combien de temps intervenez-vous dans la ville de Nice? Est-ce que tous ces dispositifs de conseil sont en place et si Autonomia est une société récente ?

CC : Ce que nous appelons le « care management » en anglais existe en France depuis quelques années. Cela remonte à quelque temps avant la crise sanitaire. À cette époque, plusieurs sociétés ont commencé à agir dans ce domaine.

La Covid a mis la lumière sur ce métier. Autonomia a vu le jour en été 2021, avec le lancement de quatre conseillers grand âge principalement dans le nord/nord-ouest de la France. Puis Autonomia s’est ouverte en fusionnant avec « Autonomie Planners », l’une des premières sociétés, fondée par Victor Perrazi sur Aix-en-Provence.

Nous sommes arrivés à Nice et à Paris en avril. La fusion avec « Autonomie Planners » a permis au réseau Autonomia d’avoir des conseillers aussi à Lyon, à Aix-en-Provence et à Nîmes. À l’heure actuelle, nous sommes neuf conseillers sur le territoire français.

CR : Quel est votre périmètre de déplacement ? Est-ce dans la ville ou pouvez-vous aller plus loin ?

CC : Je me déplace sur l’ensemble du département, et même dans les départements limitrophes, pour la partie conseil et diagnostic auprès des familles.

Mais, pour coordonner réellement les services, je me concentre sur la zone niçoise et les communes avoisinantes. La raison : les territoires sont tous différents et les professionnels aussi. Par conséquent, connaître l’ensemble des acteurs de chaque territoire n’est pas réaliste. Pour optimiser la coordination, il faut pouvoir connaître très bien son territoire et donc rester concentré sur ce qu’on connaît et ce qu’on sait faire.

Mais, j’ai des contacts avec des professionnels dans le département, voire sur les départements limitrophes pour conseiller les familles qui le désirent.

CR : Quels sont vos interlocuteurs, hormis la personne âge et ses aidants ou sa famille ?

CC : Je suis en contact avec tous les professionnels du grand âge : des acteurs typiquement locaux comme des infirmiers, ou des médecins gériatres, les CHU, les SSR, les hôpitaux et les Ehpad.

Je me tourne vers les acteurs de tout l’univers lié à la perte d’autonomie pour pouvoir apporter les meilleures solutions aux personnes. Cela comprendra même des solutions de loisir et de bien-être…

Nous aspirons en effet à permettre le bien vieillir.

Nous aspirons à offrir encore plus de chaleur humaine et plus de bienveillance dans l’aide à la personne

Clément Charcellay

Un nouveau diplôme pour un nouveau métier du grand âge

CR : Quelle formation a le conseiller grand âge ? Ce métier est quand même assez nouveau.

CC : Exactement. En tant que conseillers grand âge, nous sommes tous issus du milieu lié au vieillissement. Il s’agit d’un réseau de personnes issues de l’univers médical, notamment des infirmiers, ou des personnes qui, comme moi, sont issues du service à la personne, lié au grand âge depuis de nombreuses années.

Nous avons tous un certain niveau d’études dans ces métiers ou en tout cas dans la gestion des entreprises, des équipes ou du management, au moins sur un bac + 4 ou 5. En outre, nous suivons des formations sentinelles, les mêmes par exemple que les personnes qui viennent diagnostiquer au domicile avant de faire intervenir un ergothérapeute.

Un diplôme de conseiller grand âge a été lancé. Il s’agit d’un diplôme d’État, bac + 5, que chaque conseiller doit passer sur deux ans. Nous sommes issus de la première promotion en cours. L’obtention de ce diplôme sera une condition sine qua non pour ouvrir un cabinet de conseiller grand âge.

Le but : avoir une certaine obligation, car c’est un métier important, qui est difficile. Surtout, on met entre les mains des conseillers une, voire plus vies. Donc il ne faut pas se lancer sans formation.

CR : Y a-t-il des qualités importantes pour être conseiller grand âge ?

CC : Chaque personne est différente et c’est aussi notre force. En effet, nous sommes chacun sur un territoire différent. En fait, on constate qu’il s’agit surtout d’une philosophie plus que de qualités. Nous partageons une philosophie d’aide, d’entraide et de bien-être de la personne.

Nous sommes tous issus d’un univers commun, le grand âge. Nous avons tous eu le désir d’accompagner un peu plus, d’aller encore un peu plus loin dans chacun de nos métiers pour apporter le bien-être à la personne. Le but : offrir encore plus de chaleur humaine et plus de bienveillance dans l’aide à la personne.

La coordination : maître-mot d’un maintien à domicile efficace

CR : Qu’est-ce qui selon vous vous limitait dans vos précédentes fonctions ?

CC : La coordination des services n’était pas suffisante. Tout le monde le fait plus ou moins. En travaillant dans le domaine des services à la personne, nous sommes toujours en relation par exemple avec les infirmiers qui se déplacent à domicile, les kinés ou les médecins. Malheureusement, cela demande un temps impressionnant, difficile à trouver.

Ce n’est pas que nous ne voulons pas nous concentrer sur la coordination, mais souvent nous ne le pouvons pas. Il est particulièrement frustrant de voir une personne entrer dans la dépendance, parce que les relations entre les différents intervenants sont impossibles pour cause d’indisponibilité.

Ici, à Autonomia, nous consacrons 100 % de notre temps à cette coordination et à cette gestion de la vie de la personne au domicile. En effet, la vie de la personne implique tous les acteurs qui interviennent à son domicile : le médecin, le coiffeur et pourquoi pas le vétérinaire qui va s’occuper du chien ?

Toutes ces actions sont très difficiles à mettre en place pour des services dont ce n’est pas le métier. On peut certes le faire « bénévolement », mais on n’a pas le temps dans ces métiers plus classiques.

Nous nous sommes dit que nous pouvions aider la personne à rester chez elle, en coordonnant mieux les services dans une optique de bien vieillir.

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Yaël A.,Rédactrice chez Cap Retraite

Commentaires (5)

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  1. sarah

    C’est super ce genre d’initiatives! Je suppose qu’autonomia ne se déplace pas dans le nord? Il me semble qu’il y a seulement certaines zones ou ils se déplacent. Mais en tout cas c’est super, ça doit changer la vie des personnes que vous aidez!

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  2. annic Verdeaux

    85 ans habitant Aix en Provence . Veuve 2 fois et actuellement en dénutrition . Ne tenant plus sur mes jambes malgré ma volonté . Seule et devant faire face à beaucoup de choses . Ayant même envie d’en finir . A quoi dois-je m’attendre ? A rien .

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    1. shelby10

      Si il existe des dispositifs qui peuvent aider, il faut se renseigner auprès de la mairie ou de son CCAS. y’avait des aides auxquelles ma grand-mère avait droit et on ne le savait pas.

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  3. MABILOTTE ELIANE

    J ADMIRE CE QUE VOUS FAITES C EST TRES IMPORTANT L AIDE AUX PERSONNES AGES CAR LES PROCHES NE S EN RENDENT PAS COMPTE ET NOUS NE DISONS RIEN JE RESIDE DANS LES HAUTS DE FRANCE OU TROUVER UNE PERSONNE COMME VOUS?

    Répondre
    1. Andrea Benisti

      Bonjour,
      Merci de votre commentaire, nous allons vous contacter. Belle journée.

      Répondre

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