Les aidants familiaux jonglent quotidiennement entre obligations professionnelles et accompagnement d’un proche en situation de dépendance[1]. Face à un employeur qui refuse de reconnaître ce statut particulier, beaucoup se sentent démunis. Pourtant, la loi prévoit des dispositifs spécifiques et des protections que tout salarié aidant peut invoquer. Quelles sont vos options quand votre entreprise fait la sourde oreille à votre situation d’aidant ? Découvrez les démarches concrètes pour faire respecter vos droits sans compromettre votre carrière professionnelle.

Le Congé de Proche Aidant : un droit méconnu mais incontestable

Le Congé de Proche Aidant (CPA) constitue l’une des principales mesures permettant aux salariés de concilier vie professionnelle et rôle d’aidant. Ce dispositif n’est pas une faveur que votre employeur peut choisir d’accorder ou non – c’est un droit inscrit dans le Code du travail.

Qu’est-ce que le Congé de Proche Aidant exactement ?

Le CPA permet à tout salarié de suspendre temporairement son activité professionnelle pour s’occuper d’un proche en situation de handicap ou âgé en perte d’autonomie. Ce congé spécifique offre la possibilité de se consacrer pleinement à l’accompagnement d’une personne dépendante sans risquer de perdre son emploi.

Quelles sont les conditions du Congé de Proche Aidant ?

Pour en bénéficier, plusieurs conditions doivent être réunies :

  • La personne aidée doit présenter un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité
  • Elle doit résider en France de façon stable et régulière
  • Vous devez avoir avec elle un lien familial (conjoint, ascendant, descendant) ou une relation étroite (partage du domicile, aide régulière)

La durée maximale du CPA est de 3 mois, mais il peut être renouvelé sans dépasser un an sur l’ensemble de votre carrière professionnelle. Cette flexibilité permet d’adapter votre disponibilité aux besoins évolutifs de votre proche.

aidante demandant un congé de proche aidant

LIRE AUSSI : Peut-on cumuler l’AJPA et le RSA sans réduction de droits ?

Comment demander formellement votre congé d’aidant

La procédure de demande du Congé de Proche Aidant suit un formalisme précis qu’il convient de respecter pour éviter tout motif de refus légitime de la part de votre employeur.

Les étapes administratives à respecter

Pour faire valoir votre droit au CPA, vous devez suivre une procédure rigoureuse :

  1. Informer votre employeur par lettre recommandée avec accusé de réception ou par courriel avec confirmation de lecture
  2. Respecter un délai de prévenance d’au moins un mois avant la date souhaitée de début du congé
  3. Préciser la date de début et la durée prévisible du congé
  4. Indiquer votre intention de fractionner le congé ou de le transformer en temps partiel, le cas échéant

En cas d’urgence (dégradation soudaine de l’état de santé de votre proche, fin d’hospitalisation nécessitant votre présence), ce délai d’un mois peut être supprimé.

Les documents justificatifs à fournir

Pour appuyer votre demande, plusieurs pièces justificatives sont nécessaires :

  • Une déclaration sur l’honneur attestant du lien familial ou de la relation étroite avec la personne aidée
  • Une déclaration sur l’honneur précisant que vous n’avez pas déjà bénéficié d’un CPA dépassant la durée maximale autorisée
  • Des justificatifs médicaux attestant de l’état de santé de votre proche (carte d’invalidité, attestation d’allocation personnalisée d’autonomie, etc.)

Quand l’employeur refuse : vos options et recours légaux

Face à un refus de votre employeur de prendre en compte votre statut d’aidant, il est essentiel de connaître vos droits et les recours à votre disposition.

Un droit que l’employeur ne peut pas refuser

Il est important de souligner que si toutes les conditions légales sont remplies et que la procédure a été correctement suivie, votre employeur ne peut pas refuser votre demande de Congé de Proche Aidant. Ce n’est pas une faveur soumise à son bon vouloir mais un droit garanti par la loi.

Les seuls motifs légitimes de report (et non de refus) que peut invoquer l’employeur sont :

  • Le dépassement du nombre maximal de salariés absents simultanément au titre du CPA dans l’entreprise
  • Des raisons organisationnelles impératives, mais le report ne peut excéder 3 mois

Les actions à entreprendre face à un refus injustifié

Si malgré tout, votre employeur refuse de vous accorder ce congé sans motif valable, plusieurs options s’offrent à vous :

  1. Dialogue et médiation : Tentez d’abord d’expliquer votre situation et vos droits à votre employeur ou au service RH
  2. Intervention des représentants du personnel : Sollicitez l’aide des délégués du personnel ou du CSE
  3. Inspection du travail : Contactez l’inspection du travail qui pourra rappeler à l’employeur ses obligations légales
  4. Recours juridique : En dernier recours, saisissez le conseil de prud’hommes pour faire valoir vos droits

N’hésitez pas à conserver toutes les preuves de vos échanges avec votre employeur (emails, courriers, etc.) qui pourront servir en cas de litige.

L’indemnisation pendant votre congé d’aidant

L’un des freins majeurs à la prise du Congé de Proche Aidant était autrefois l’absence de rémunération. Depuis octobre 2020, ce congé est désormais indemnisé, ce qui constitue une avancée significative pour les aidants.

L’Allocation Journalière du Proche Aidant (AJPA)

L’AJPA est versée par la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) ou la Mutualité Sociale Agricole (MSA) aux salariés en Congé de Proche Aidant. En 2025, son montant s’élève à 65,80 € par jour pour une personne seule.

Pour en bénéficier, vous devez :

  • Être en Congé de Proche Aidant
  • Avoir réduit ou cessé votre activité professionnelle
  • Résider en France
  • Adresser une demande à la CAF ou à la MSA
calcul du montant de l'AJPA en 2025

L’AJPA est versée dans la limite de 22 jours par mois et peut atteindre jusqu’à 66 jours d’indemnisation par proche accompagné.

Un aidant peut en bénéficier pour jusqu’à quatre personnes différentes au cours de sa carrière, soit un maximum de 264 jours indemnisés au total.

Les autres formes de soutien financier

Au-delà de l’AJPA, d’autres dispositifs peuvent vous aider financièrement :

Don de jours de repos entre collègues – un soutien solidaire pour les aidants

Vous pouvez bénéficier d’un don de jours de repos si vous êtes aidant salarié dans la même entreprise qu’un collègue prêt à vous soutenir. Ce dispositif vous permet de conserver votre salairependant votre absence tout en maintenant vos droits à l’ancienneté.

Le salarié donateur peut vous céder :

  • des jours de congé payé, s’il a déjà pris 24 jours ouvrables
  • des jours de RTT
  • des jours placés sur un compte épargne-temps.

Le don peut être anonyme, mais il nécessite l’accord de l’employeur. Les conditions à remplir sont identiques à celles du congé de proche aidant : vous devez accompagner un proche en perte d’autonomie, âgé ou en situation de handicap.

🤝 Une démarche humaine qui vous aide à conjuguer engagement familial et sécurité financière.

Préserver votre carrière pendant et après votre congé

L’un des enjeux majeurs pour les aidants est de maintenir leur trajectoire professionnelle malgré les interruptions liées à leur rôle d’accompagnant.

Votre retour au travail : des garanties légales

La loi prévoit plusieurs protections pour faciliter votre réintégration professionnelle après un Congé de Proche Aidant :

  • Le droit de retrouver votre emploi initial ou un poste similaire avec une rémunération au moins équivalente
  • La conservation de vos avantages acquis avant le début du congé
  • La prise en compte de la durée du congé pour le calcul de vos droits liés à l’ancienneté

Pour préparer au mieux cette réintégration, un entretien professionnel est prévu avant et après le congé. Ce moment d’échange permet d’évaluer vos compétences, d’anticiper vos besoins de formation et d’envisager les évolutions possibles de votre carrière.

Les alternatives au congé complet : aménagements du temps de travail

Le Congé de Proche Aidant n’est pas la seule solution pour concilier activité professionnelle et accompagnement d’un proche. Des aménagements du temps de travail peuvent constituer des alternatives intéressantes.

Les formules flexibles à négocier avec votre employeur

Plusieurs options peuvent être envisagées :

  • Le fractionnement du CPA en périodes plus courtes, permettant d’alterner présence au travail et auprès de votre proche
  • La prise du congé sous forme de période d’activité à temps partiel. Dans ce cas, il est aussi possible de bénéficier de l’AJPA, à hauteur de 32,90 € par demi-journée (tarif de 2025).
  • Le télétravail, qui offre davantage de flexibilité dans l’organisation de votre temps
  • Des horaires aménagés (décalés, compressés sur certains jours de la semaine)

Comment aborder la négociation avec votre employeur

Pour maximiser vos chances d’obtenir ces aménagements :

  1. Préparez un dossier solide présentant votre situation et vos besoins spécifiques
  2. Proposez des solutions concrètes qui permettent de maintenir votre efficacité professionnelle
  3. Mettez en avant les bénéfices pour l’entreprise (fidélisation, motivation, image responsable)
  4. Suggérez une période d’essai pour tester la viabilité de l’arrangement proposé

N’oubliez pas que certains accords d’entreprise ou conventions collectives peuvent prévoir des dispositions plus favorables que la loi en matière d’aménagement du temps de travail pour les aidants.

Vos droits en tant qu’aidant salarié
Droit
Description
Conditions
Congé de proche aidant
Suspension du contrat pour aider un proche dépendant
  • Lien familial ou étroit
  • État de dépendance grave
  • Résidence en France
AJPA
  • Indemnité de 65,80 €/jour ou 32,90 € par demi-journée (2025)
  • Versée jusqu’à 66 jours par proche aidé
  • Jusqu’à 4 personnes aidées (soit 264 jours sur la carrière)
  • Être en CPA
  • Avoir cessé ou réduit l’activité
  • Résider en France
Retour au travail
  • Poste équivalent
  • Ancienneté conservée
À la fin du congé
Aménagement du temps
  • Temps partiel
  • Télétravail
  • Horaires aménagés
À négocier avec l’employeur

Où trouver du soutien et des informations complémentaires

Face à la complexité des démarches et des dispositifs, il est essentiel de savoir où chercher de l’aide et des informations fiables.

Les ressources institutionnelles et associatives

De nombreuses structures peuvent vous accompagner dans vos démarches :

  • Allô Service Public (3939) : pour des informations générales sur vos droits
  • La CAF ou la MSA : pour tout ce qui concerne l’AJPA
  • Le site service-public.fr : pour consulter les textes légaux et les procédures officielles
  • Les associations d’aidants comme « Aidons les nôtres » qui proposent informations, conseils et groupes de parole
  • Les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) : pour les situations impliquant un proche en situation de handicap

Le cadre juridique à connaître

Pour faire valoir efficacement vos droits, il est utile de connaître les principaux textes légaux qui encadrent le statut d’aidant :

  • Les articles L3142-16 à L3142-27 du Code du travail relatifs au Congé de Proche Aidant
  • L’article L381-1 du Code de la sécurité sociale concernant l’affiliation à l’assurance vieillesse des aidants
  • Les articles L168-8 à L168-16 du Code de la sécurité sociale relatifs à l’AJPA

En cas de litige avec votre employeur, n’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé en droit du travail ou à contacter les services juridiques gratuits proposés par certaines mairies ou associations.

Face à un employeur réticent à reconnaître votre rôle d’aidant, la connaissance de vos droits constitue votre meilleure protection. Le Congé de Proche Aidant n’est pas une faveur mais un droit inscrit dans la loi que votre employeur ne peut refuser si vous remplissez les conditions requises. Entre l’indemnisation par l’AJPA, les garanties de retour à l’emploi et les possibilités d’aménagement du temps de travail, plusieurs options s’offrent à vous pour concilier vie professionnelle et accompagnement de votre proche. N’hésitez pas à vous faire accompagner dans vos démarches par les nombreuses ressources disponibles et à faire valoir fermement mais sereinement vos droits légitimes.

Pour aller plus loin : le congé de solidarité familiale – accompagner un proche en fin de vie

Si l’un de vos proches est en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable, vous pouvez demander un congé de solidarité familiale pour rester à ses côtés. Ce congé, distinct du congé de proche aidant, vous permet de suspendre temporairement votre activité professionnelle.

Vous pouvez en bénéficier si la personne accompagnée est l’une des personnes suivantes :

  • ascendant,
  • descendant,
  • frère ou sœur
  • personne partageant votre domicile ou vous ayant désigné comme sa personne de confiance.

Le congé peut être :

  • pris en une seule fois ou de façon fractionnée,
  • ou transformé en période d’activité à temps partiel.

Sa durée maximale est de 3 mois, renouvelable une fois.

💶 Une indemnité appelée AJAP (Allocation Journalière d’Accompagnement d’une Personne en fin de vie[2]) peut vous être versée. Elle s’élève à :

  • 64,41 € par jour (2025) si vous cessez totalement votre activité,
  • 31,76 € à temps partiel.

Ce dispositif essentiel peut vous permettre de soutenir un proche jusqu’au bout, sans sacrifier votre stabilité professionnelle.

Questions fréquentes

Quelle différence entre le congé de proche aidant et le congé de solidarité familiale ?

Le congé de proche aidant s’adresse aux personnes accompagnant un proche dépendant sur le long terme. Le congé de solidarité familiale, lui, concerne l’accompagnement en fin de vie d’un proche atteint d’une maladie incurable. Leur durée, leurs conditions et leurs indemnisations diffèrent.

Peut-on cumuler l’AJPA et une rémunération par l’APA en tant qu’aidant familial ?

Non, vous ne pouvez pas cumuler l’AJPA (versée pendant le congé de proche aidant) avec une rémunération perçue au titre de l’APA (Allocation personnalisée d’autonomie) en tant qu’intervenant rémunéré.

L’AJPA suppose une interruption ou une réduction d’activité professionnelle, tandis que la rémunération par l’APA implique une activité déclarée. Vous devez donc choisir l’un ou l’autre dispositif pour une même période.

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Commentaires (2)

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  1. Sylviane poux

    Et si on est aidant de plusieurs personnes, qu’en est-il ?
    Démarches
    Durée
    Rémunération…
    Merci

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      Si vous êtes aidant de plusieurs personnes, vous pouvez demander un congé proche aidant par personne aidée, avec démarches auprès de l’employeur, et allocation journalière (AJPA) possible via la CAF.
      Bonne journée.
      Amandine

      Répondre

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