Apprendre que son parent ou proche est admis dans une unité Alzheimer suscite de nombreuses questions. La première étant souvent : dois-je lui rendre visite régulièrement ? Cette interrogation légitime s’accompagne d’appréhensions. On craint de perturber son quotidien, on redoute de ne pas savoir comment réagir face à des comportements nouveaux, ou simplement on a peur de sa propre réaction émotionnelle. Pourtant, ces visites peuvent représenter un soutien essentiel pour la personne atteinte et maintenir un lien affectif précieux.
Pourquoi visiter un proche en unité Alzheimer ?
Les visites aux personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer[1] ou de troubles apparentés sont importantes à plusieurs niveaux.
Le maintien du lien affectif
Même si votre proche ne vous reconnaît pas toujours, le lien émotionnel persiste souvent bien au-delà de la mémoire des faits. Une visite peut générer des émotions positives qui perdurent après votre départ, même si le souvenir précis de votre venue s’efface. La reconnaissance affective dépasse souvent la reconnaissance cognitive.

Un repère dans le temps
Les visites régulières créent des repères temporels pour la personne. Elles peuvent structurer sa semaine et lui offrir des moments d’anticipation positive. Ce rythme pourrait contribuer à diminuer l’anxiété liée à la perte de repères.
Un soutien moral indispensable
Votre présence rassure et réconforte. Elle rappelle à votre proche qu’il n’est pas abandonné et qu’il compte toujours pour quelqu’un. Ce sentiment d’appartenance reste fondamental, quel que soit le stade de la maladie.
Fréquence des visites : trouver le bon équilibre
La question du rythme des visites est centrale et mérite réflexion.
Adapter la fréquence à l’état de santé
Selon le stade de la maladie et la réceptivité de votre proche, la fréquence idéale varie. Au début, des visites plus fréquentes facilitent l’adaptation à ce nouvel environnement. À des stades plus avancés, leur durée pourra être réduite mais leur régularité maintenue.
Prendre en compte la distance géographique
Si vous habitez loin, des visites moins fréquentes mais plus longues peuvent être envisagées. L’équipe soignante peut vous conseiller sur les meilleurs moments pour venir, selon le rythme de vie de votre proche.
Respecter ses propres limites
Visiter un proche atteint d’Alzheimer peut être éprouvant émotionnellement. Il est légitime de doser vos visites selon votre propre bien-être psychologique. La culpabilité n’est pas une bonne conseillère, mieux vaut des visites moins fréquentes mais sereines que des visites contraintes.
Comment préparer sa visite en unité Alzheimer ?
Une visite réussie se prépare, tant sur le plan pratique qu’émotionnel.
Se renseigner sur l’état du jour
Avant de vous déplacer, un appel à l’unité peut vous informer de l’état de votre proche ce jour-là. Certains jours sont plus favorables que d’autres pour les visites, notamment en fonction des cycles de sommeil ou des éventuelles périodes d’agitation.
Choisir le bon moment de la journée
Évitez les moments de soins, de repas (sauf si vous souhaitez y participer avec l’accord de l’équipe), ou la fin d’après-midi qui peut correspondre au « sundowning » (confusion accrue en fin de journée). La matinée ou le début d’après-midi sont souvent des moments propices.
Préparer un petit rituel
Apporter un objet familier, une photo, ou prévoir une activité simple peut faciliter l’interaction. Ces éléments servent de support à l’échange et réduisent l’anxiété de part et d’autre.
Que faire pendant la visite ?
Le contenu de la visite peut varier selon les capacités et les goûts de votre proche.
Privilégier les activités simples
La lecture d’un magazine, l’écoute de musique, une promenade dans le jardin sécurisé de l’établissement ou simplement tenir la main de votre proche sont des activités adaptées. L’important n’est pas tant ce que vous faites que le moment partagé.

Communiquer autrement
La communication verbale peut devenir difficile avec l’évolution de la maladie. Le toucher, les regards, les sourires prennent alors une importance particulière. Un simple contact physique rassurant (tenir la main, caresser le bras) peut véhiculer plus d’émotions que des mots.
S’adapter à l’humeur du moment
Votre proche peut traverser différents états émotionnels pendant votre visite. Acceptez ces variations sans les prendre personnellement. Si l’agitation survient, proposez un changement d’activité ou un moment de calme.
- Évitez de contredire ou de corriger constamment votre proche
- Privilégiez des phrases courtes et un ton calme
- Acceptez les silences qui font partie de l’échange
Les réactions difficiles : comment les gérer ?
Certaines situations peuvent être déstabilisantes lors des visites.
Face à la non-reconnaissance
Si votre proche ne vous reconnaît pas, évitez de le mettre à l’épreuve avec des « Tu ne me reconnais pas ? ». Présentez-vous simplement : « Bonjour, c’est Michel, ton fils » et continuez la conversation naturellement.
Lors d’une réaction agressive
L’agressivité est rarement dirigée contre vous personnellement : elle exprime souvent une frustration, une douleur ou une incompréhension. Si votre proche s’agite, restez calme, parlez doucement et éventuellement proposez de revenir plus tard. Informez toujours l’équipe soignante de ces réactions.
En cas d’apathie apparente
Le manque de réaction ne signifie pas absence d’émotion ou d’intérêt. Continuez à parler doucement, à maintenir un contact physique si celui-ci est bien accepté. Votre présence compte, même si les manifestations extérieures sont limitées.
Les règles spécifiques des unités Alzheimer
Chaque établissement possède son fonctionnement propre qu’il convient de respecter.
Horaires et protocoles de visite
Les unités Alzheimer ont généralement des horaires de visite plus encadrés que les autres services. Ces règles visent à préserver les repères des résidents et l’organisation des soins. Renseignez-vous sur ces horaires et respectez-les.
Objets autorisés et interdits
Certains objets peuvent être déconseillés (objets tranchants, médicaments) ou au contraire encouragés (photos, vêtements confortables). Demandez conseil à l’équipe avant d’apporter des cadeaux ou effets personnels.
Participation aux activités de l’unité
De nombreuses unités proposent des activités auxquelles les familles peuvent participer : ateliers mémoire, séances de musicothérapie, repas festifs. Ces moments partagés peuvent faciliter les visites en leur donnant un cadre structuré.
Communiquer avec l’équipe soignante
Une bonne relation avec les professionnels enrichit l’expérience des visites.
Partager vos observations
N’hésitez pas à faire part à l’équipe de vos observations pendant la visite : un comportement inhabituel, une douleur suspectée, mais aussi des moments de bien-être. Ces informations sont précieuses pour ajuster l’accompagnement.
Demander conseil
Les soignants peuvent vous suggérer des approches adaptées à l’état actuel de votre proche. Leur expérience quotidienne auprès de personnes atteintes d’Alzheimer constitue une ressource inestimable pour faciliter vos interactions.
Informer de vos visites
Prévenir de vos visites permet à l’équipe d’organiser les soins en conséquence et de préparer votre proche si nécessaire. Cela évite aussi de vous déplacer lors d’un rendez-vous médical ou d’une activité extérieure.
Prendre soin de soi en tant que visiteur
Rendre visite régulièrement à un proche atteint d’Alzheimer peut être éprouvant émotionnellement.
Gérer ses émotions
Tristesse, culpabilité, frustration… ces sentiments sont normaux face à la maladie d’un être cher. Les reconnaître sans se juger est la première étape pour les gérer. Parler à d’autres familles dans la même situation peut aider à les mettre en perspective.
Se faire accompagner
Venez à plusieurs lors de certaines visites pour partager ce moment et vous soutenir mutuellement. Les enfants peuvent également participer, avec une préparation adaptée à leur âge.
- Rejoignez un groupe de parole pour familles
- N’hésitez pas à consulter un psychologue si nécessaire
- Accordez-vous des pauses entre les visites
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Les alternatives aux visites physiques
Quand la distance ou d’autres contraintes limitent les visites, d’autres formes de contact existent.
Les appels téléphoniques ou vidéo
Selon les capacités de votre proche et les équipements de l’établissement, des appels réguliers peuvent maintenir le lien. Les appels vidéo, en particulier, permettent une communication plus complète incluant les expressions faciales.
Les courriers et colis
Une lettre simple, une carte postale colorée ou un petit colis contenant des objets sensoriels (une écharpe douce, un sachet de lavande) peuvent apporter du réconfort entre deux visites. Le personnel peut aider votre proche à découvrir ces envois.
Les messages transmis par le personnel
N’hésitez pas à téléphoner à l’unité pour transmettre un message affectueux que les soignants relayeront à votre proche. Cette attention simple montre votre présence malgré la distance.
Quelle évolution pour les visites au fil du temps ?
La maladie d’Alzheimer étant évolutive, les modalités des visites doivent s’adapter progressivement.
S’ajuster à la progression de la maladie
Avec l’évolution des troubles, les visites peuvent devenir plus courtes mais rester tout aussi importantes. L’approche sensorielle (musique, parfums familiers, textures agréables) prend souvent le relais de la communication verbale.
Maintenir une présence jusqu’au bout
Même aux stades avancés, il est possible que la personne malade perçoive encore positivement votre présence, même si elle ne peut plus l’exprimer clairement. Ces moments partagés conservent une valeur inestimable, tant pour elle que pour vous.
Rendre visite à un proche en unité Alzheimer représente un acte d’amour qui demande adaptation et patience. Ces moments, parfois difficiles, peuvent aussi être source de connexions profondes et authentiques. Chaque visite s’inscrit dans une continuité affective qui transcende les limites imposées par la maladie. L’essentiel n’est pas la perfection de ces rencontres, mais la chaleur humaine qu’elles apportent dans le quotidien de votre proche.
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[1] Alzheimer
La maladie d’Alzheimer est une maladie qui affecte le cerveau, entraînant des pertes de mémoire et des difficultés à penser clairement, rendant progressivement les tâches quotidiennes plus difficiles.
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