Chaque année, des milliers de Français découvrent, souvent par hasard, que leurs reins fonctionnent moins bien qu’ils ne l’imaginaient. Fatigue, essoufflement, jambes gonflées… Ces signes ne se manifestent que tardivement. Le débit de filtration glomérulaire (DFG), ce chiffre niché dans les résultats de prise de sang, alerte des années avant les symptômes. Peu connu du grand public, il révèle pourtant l’état réel des reins et la possibilité d’éviter l’insuffisance rénale, un piège souvent silencieux.

À quoi sert le DFG ?

Les reins filtrent le sang en continu, éliminant déchets et excès d’eau. Ce travail, vital, s’effectue dans les glomérules, micro-filtres du rein. Le DFG mesure le volume de sang épuré chaque minute par ces filtres. Un témoin précis de la santé rénale. Plus ce débit baisse, plus le risque de complications augmente.

Le DFG ne chute pas brutalement. Il s’effrite, lentement. Parfois dès 40 ans, il baisse naturellement, mais la vigilance s’impose dès qu’un seuil critique est franchi.

senior recevant son DFG et discutant avec son médecin

Comprendre les chiffres : que révèle le DFG ?

StadeDFG (ml/min/1,73 m²)Signification 
1≥ 90Fonction rénale normale ou altération débutante
260–89Légère diminution, surveillance conseillée
330–59Diminution modérée, prise en charge indispensable
415–29Diminution sévère, préparation à la suppléance
5< 15Insuffisance terminale, dialyse ou greffe impérative

Un DFG supérieur à 60 rassure, mais la surveillance reste de mise si l’on appartient à une catégorie à risque. Passé sous 60, le risque de maladie rénale chronique devient réel. Sous 30, les complications guettent et la vie quotidienne change.

Comment le DFG est-il mesuré ?

Le test phare : le dosage sanguin de la créatinine. Ce déchet, issu des muscles, s’accumule si les reins filtrent mal. Plus la créatinine grimpe, plus le DFG chute. Pour affiner, le laboratoire utilise des formules (CKD-EPI, MDRD), tenant compte de l’âge, du sexe, et parfois de l’origine ethnique.

Dans certains cas, la cystatine C, autre marqueur, permet de lever les doutes (personnes âgées ou très musclées, situations ambiguës). Rarement, une mesure directe du DFG par injection de substance spécifique – réservée à des contextes particuliers – apporte la réponse.

  • Analyse sanguine : créatinine (standard)
  • Formules d’estimation : Cockcroft, MDRD, CKD-EPI
  • Analyse urinaire : recherche d’albumine
  • Parfois, mesure directe (clairance iohexol, radiotraceur)

Albuminurie et protéinurie : le duo d’alerte

Le DFG ne dit pas tout. L’analyse d’urine complète l’enquête. Un rein sain retient les protéines (albumine). Si le filtre fuit, l’albumine passe dans l’urine : c’est l’albuminurie. En dessous de 30 mg/g, tout va bien. Au-dessus, surtout si le DFG est bas, l’alerte se confirme.

Plus l’albuminurie grimpe, plus les lésions rénales sont importantes. Le croisement DFG/albuminurie oriente le médecin pour la suite : intensification des traitements, surveillance rapprochée, bilan complémentaire.

senior recevant les résultats de son analyse d'urine

Pourquoi surveiller le DFG ?

Diabétiques, hypertendus, personnes obèses, antécédents cardiaques ou familiaux… Tous partagent un risque accru de maladie rénale. Pour eux, un DFG stable rassure. Dès qu’il chute, il impose une réaction. Les maladies rénales avancent masquées, indolores, silencieuses. Un suivi annuel, simple (prise de sang, analyse d’urine) suffit à devancer la maladie.

Le DFG n’est pas qu’un chiffre, c’est un radar. Il révèle la dégradation avant les symptômes. Détecter tôt, c’est gagner des années de vie sans dialyse, éviter les complications cardiaques, limiter l’accumulation de toxines.

Quand s’inquiéter ? Signes et symptômes à ne pas ignorer

  • Fatigue persistante, pâleur inhabituelle
  • Œdèmes : chevilles, paupières, jambes gonflées
  • Urines mousseuses, troubles digestifs (perte d’appétit, nausées), crampes nocturnes
  • Hypertension artérielle, essoufflement inexpliqué

Longtemps, rien. Puis, la vie ralentit. Mais il n’est pas nécessaire d’attendre ces signaux pour agir.

DFG bas : quels réflexes pour protéger ses reins ?

  • Contrôler sa tension et sa glycémie (si diabétique)
  • Réduire l’apport en sel, adopter une alimentation équilibrée
  • Limiter les protéines si le médecin le recommande
  • Arrêter de fumer, bouger régulièrement
  • Éviter l’automédication, surtout les anti-inflammatoires
  • Consulter un spécialiste (néphrologue) dès que le DFG passe sous 45 ml/min/1,73 m²

Un DFG qui baisse n’est pas une fatalité. L’objectif : freiner la progression, préserver la fonction restante. Plus le diagnostic est posé tôt, plus les chances de garder ses reins longtemps augmentent.

Questions fréquentes sur le DFG et la santé rénale

Peut-on remonter son DFG ?

Non, mais en agissant sur les causes (hypertension, diabète, tabac), on ralentit souvent la chute.

À partir de quel chiffre s’alarmer ?

Un DFG sous 60 ml/min/1,73 m², confirmé à distance, doit mener à un suivi médical rapproché.

Pourquoi surveiller albuminurie et DFG ?

Parce que l’association d’un DFG bas et d’une albuminurie élevée signe un risque de complications rénales et cardiovasculaires.

Dois-je consulter un spécialiste ?

Oui, dès que le DFG descend sous 45 ou si l’évolution est rapide, surtout en cas d’antécédents familiaux.

Certains médicaments faussent-ils le résultat ?

Oui. Certains antibiotiques, antiulcéreux, antirétroviraux peuvent fausser la créatininémie. Toujours signaler ses traitements au laboratoire.

La maladie rénale chronique concerne près de 10 % de la population, la plupart sans le savoir. Chaque année, 11 000 personnes atteignent le stade terminal. Pourtant, un dépistage simple, accessible partout, repère ceux qui risquent de basculer. La Semaine Nationale du Rein, organisée chaque printemps, offre un accès gratuit à ces tests, sans rendez-vous. Les campagnes de prévention insistent : le DFG, discret mais décisif, permet d’agir à temps. Préserver ses reins commence par la connaissance de ce chiffre clé. Un DFG surveillé, c’est une vie prolongée sans dialyse. Les reins ne préviennent pas : le DFG, lui, le fait.

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Commentaires (5)

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  1. Angel g

    Je voulais savoir ce que signifiait, évolution rapide? J’ai fait des examens en avril et j’étais à 92ml je viens d’en refaire et je suis aujourd’hui à 85ml.
    Est ce une baisse rapide même si le taux n’est pas alarmant?
    Merci.

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      L’expression « évolution rapide » peut varier selon l’interprétation médicale et le suivi.
      Bonne journée.
      Amandine

      Répondre
  2. Pascal Guerillot

    En cas d’insuffisance rénale, que signifie une surveillance accrue ?
    Y a-t-il des traitements pour soigner les reins ?

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      Cela signifie qu’il faut suivre régulièrement votre état, et il existe des approches possibles selon chaque situation.
      Bonne journée.
      Amandine

      Répondre
  3. Nathalie

    Article très intéressant car instructif, accessible et « solutionniste ». Merci 🙏

    Répondre

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