Dépendantes, alitées ou présentant des problèmes de mobilité, les personnes âgées en perte d’autonomie sont environ 300 000 en France à être exposées au développement d’escarres. Ces affections graves, aussi appelées ulcères de pression, sont des plaies de lit ou d’assise dont souffrent les patients immobilisés, à cause d’un handicap ou de troubles moteurs qui empêchent de changer facilement de position. Mais alors, peut-on mourir d’une escarre

Malgré les meilleurs soins infirmiers et médicaux, une escarre peut évoluer vers des stades avancés, difficiles à maîtriser et à traiter, jusqu’à développer une infection potentiellement mortelle. Pour éviter le pire, voici les conséquences des escarres et les soins possibles selon leur gravité.

Peut-on mourir d’une escarre : quand s’inquiéter ? 

Les personnes en partie ou totalement immobile en raison d’une maladie, d’une paralysie ou d’un âge avancé ont un risque de développer des escarres. Ces lésions cutanées peuvent entraîner des complications sévères, mettant en péril leur santé et leur vie. 

Dès les premiers signes

Chez les personnes âgées immobiles et vulnérables, le moindre début d’infection est à prendre au sérieux.

senior souffrant d'une escarre de stade 1

Les professionnels de la santé se servent d’un système de classement par stade pour décrire la gravité des escarres :

  • L’escarre de stade 1 : une affection dure, chaude apparaît avec une décoloration de la peau : en rouge chez les personnes à la peau blanche, et violette ou bleu chez les personnes à la peau plus foncée. La plaie ne blanchit pas après une pression du doigt, mais peut être douloureuse ou démanger. À ce stade, les tissus musculaires peuvent être déjà endommagés.
  • L’escarre de stade 2 : la plaie s’ouvre par abrasion (frottement), entraîne une perte de peau ou forme une cloque.
  • L’escarre de stade 3 : les tissus noircissent et des croûtes se forment. Les 3 couches de la peau sont touchées. Une cavité se forme.
  • L’escarre de stade 4 : la plaie, atteint le muscle, voire les os et tendons et présente un risque élevé de développer une infection parfois mortelle.

Les risques de développer une escarre 

Les escarres sont le produit d’une interaction complexe de différents facteurs, essentiels à identifier pour prévenir le développement des plaies et des complications.

  • Une immobilité prolongée en position assise ou allongée : deux heures d’immobilité totale suffisent à former des escarres !
  • La perte de sensation : les individus atteints de troubles neurologiques ou de diabète (qui altère la sensation cutanée), peuvent ne pas ressentir et réagir à la compression de la peau.
  • L’exposition prolongée à l’humidité due à l’incontinence urinaire ou fécale fragilise la peau et augmente le risque d’escarres dans les zones génitales et périnéales.
  • La malnutrition et la déshydratation affaiblissent la peau et ralentissent la cicatrisation.

Quelles sont les complications mortelles liées aux escarres ?

Les escarres, souvent perçues comme des plaies de pression superficielles peuvent devenir une porte d’entrée aux bactéries, augmentant ainsi le risque d’infection sévère.

Les risques infectieux

Non prises en charge à temps, les escarres sont à l’origine de nombreuses complications physiques et psychologiques :

  • une infection douloureuse et localisée de la plaie,
  • de l’eczéma ou de l’érysipèle autour de la plaie, 
  • un streptocoque, 
  • à long terme, le développement de cellules cancéreuses dans la plaie,
  • une infection généralisée (septicémie), anémie ou dénutrition
  • un tétanos si la personne n’est pas vaccinée ou à jour dans ses vaccins,
  • une perte d’autonomie et de qualité de vie avec un mal-être lié à la peur d’une fin de vie.

Les complications post-opératoires

Même après une intervention chirurgicale, les risques de complications demeurent, notamment avec la fragilité et les problèmes de santé sous-jacents des patients âgés, en proie à : 

  • une infection,
  • la nécrose des tissus du lambeau implanté,
  • une faiblesse musculaire,
  • des cloques,
  • la récurrence des escarres,
  • une infection du sang,
  • une infection de l’os,
  • une hémorragie interne,
  • des abcès,
  • une thrombose veineuse profonde.

Les traitements pour ne pas mourir d’une escarre 

Face à la complexité des soins et à la rapidité de développement des plaies, plusieurs mesures s’imposent pour faciliter la cicatrisation et éviter une infection irréversible.

Des soins réguliers 

Cicatriser une escarre implique un nettoyage et une désinfection réguliers de la plaie et des tissus nécrosées, appelés détersion. Pour renforcer ce processus naturel, mais difficile chez les personnes âgées, l’intervention d’une équipe soignante multidisciplinaire (EMD), composée de toutes sortes de professionnels de la santé peut aider pour : 

  • L’application d’une crème à la trypsine. 
  • La pose d’un pansement gras (hydrocolloïde ou hydrocellulaire, dits de seconde peau) pour protéger la plaie. 
  • Un traitement par pression négative (TPN) pour réduire le temps de réparation tissulaire. Une mousse stérile est placée directement sur la plaie puis recouverte d’un film étanche, relié à une machine. Cette dernière aspire l’air et les sécrétions de la plaie tout en stimulant la régénération cellulaire.

Améliorer le confort du patient

La cicatrisation de l’escarre chez les personnes âgées est plus complexe à traiter compte tenu de leur peau fragilisée et des divers problèmes de santé sous-jacents. Dès les premiers stades, une surveillance accrue est primordiale pour limiter les facteurs aggravants. 

1- Changer régulièrement les pansements, le linge de lit et choisir des textiles doux pour la peau.

2- Aider le patient à changer de position toutes les 2 à 4 heures.

Femme âgée dans son lit, aidée à se lever par une aide soignante. Exemple de soin préventif d'une escarre

Un kinésithérapeute peut intervenir pour aider le patient à : 

  • retrouver sa mobilité 
  • changer de position 
  • réapprendre à se lever 
  • s’asseoir 
  • remarcher quand c’est possible.

3- S’équiper de matériel anti-escarre comme des coussins bouée ou des matelas en mousse à mémoire de forme et respirant allègent la pression du corps sur les zones touchées. 

Pour les personnes souffrant d’escarres de stade 3 ou 4, des matelas ou un système de literie plus sophistiqué, reliés à un flux d’air constant automatique réduit la pression en fonction des exigences.

Lutter contre les carences alimentaires 

La dénutrition est un autre facteur au développement d’escarres, dont souffrent de nombreux seniors. Or, pour accélérer la guérison des plaies, les patients doivent consommer suffisamment certaines protéines, du zinc et de la vitamine C. Vérifiez auprès d’un diététicien qu’il n’y ait aucune carence de ces nutriments dans l’alimentation. Auquel cas des compléments alimentaires devront être administrés. Bien entendu, maintenir une hydratation suffisante est essentiel dans le processus de guérison. 

EN SAVOIR PLUS SUR : la déshydratation des personnes âgées

Les solutions en cas de plaies nécrosées

Traiter les escarres chez les personnes âgées reste difficile. Si l’infection évolue en stade 3 ou 4, des soins plus techniques et radicaux s’imposent. 

Le débridement

Le débridement consiste à enlever les tissus morts de l’escarre pour stimuler le processus de guérison. Les petites quantités de tissus morts s’enlèvent à l’aide de pansements et d’une pâte spécialement conçue à cet effet.

En cas de quantités plus importantes, les tissus nécrosés s’enlèvent par : 

  • nettoyage et irrigation à l’aide de jet d’eau sous haute pression 
  • ultrason 
  • laser 

L’asticothérapie

L’asticothérapie, ou larvothérapie, est une méthode alternative de débridement. Un pansement pour plaie mélangé à des asticots est appliqué sur la zone affectée, elle-même recouverte de gaz. Pour combattre l’infection, les larves : 

  • se nourrissent des tissus morts et infectés sans toucher aux tissus sains 
  • libèrent des substances qui tuent les bactéries et stimulent le processus de guérison.

Après quelques jours, le pansement et les asticots sont enlevés.

La chirurgie

Lorsque ces techniques ne suffisent pas à guérir une escarre de stade 3 ou 4, la chirurgie sera le dernier recours pour fermer la plaie et empêcher la survenue d’autres lésions tissulaires, voire de septicémie ou de gangrène.

La technique chirurgicale consiste en la reconstruction du lambeau). Le chirurgien débride le tissu nécrosé de l’escarre à l’aide d’un scalpel et le remplace par un lambeau de peau et de muscle prélevé sur une autre partie du corps pour fermer l’emplacement de l’escarre.

Comme expliquée précédemment, cette greffe de peau reste une intervention chirurgicale délicate.

Avec 1 million de personnes sujettes aux escarres d’ici 2030, ces plaies représentent un problème sanitaire répandu et souvent sous-estimé. Pourtant, non prises en charge dès les premiers stades, ces infections peuvent devenir mortelles. De plus, un patient ayant déjà eu une escarre est susceptible d’en développer d’autres. Il est donc primordial d’inspecter régulièrement les zones de contact susceptibles de générer de nouvelles escarres, d’autant plus si la personne est alitée ou assise en fauteuil roulant.

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Commentaires (4)

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  1. Adeline Sibony

    Cet article informatif m’a éclairé sur un sujet dont j’ignorais tout : les escarres. Je le conseille vivement, car cette connaissance pourrait même être vitale.

    Répondre
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