En France, recevoir un héritage n’a rien d’anodin. Derrière le chagrin, la question de l’impôt[1] surgit presque toujours. Et là, la mécanique fiscale peut surprendre, parfois même choquer, tant les écarts de traitement sont marqués. Entre frères et sœurs, la différence se joue souvent à quelques milliers d’euros, ou à rien du tout. Comprendre ce fossé, c’est plonger dans la logique des abattements, des barèmes, du lien de parenté, et des exceptions qui font basculer une succession du tout au rien.
Le barème des droits de succession : l’origine de la fracture
Tout commence avec le lien de parenté. La loi ne considère pas un frère comme un enfant, ni une sœur comme une épouse : fiscalement, la hiérarchie est stricte. Plus le lien est fort, plus l’État se montre « généreux » sur l’abattement, ce montant qui échappe à l’impôt. En ligne directe (enfants, parents), chaque héritier a droit à 100 000 euros exonérés, par parent. Les conjoints et partenaires de PACS profitent depuis 2007 d’une exonération totale, quel que soit le montant. Pourtant, pour les frères et sœurs, la règle change radicalement : l’abattement tombe à 15 932 euros.
Au-delà de ce seuil, le fisc prélève 35 % sur la part imposable jusqu’à 24 430 euros, puis 45 % au-dessus. Autrement dit, hériter d’une somme modeste ne coûte rien, mais dès qu’on dépasse l’abattement, la facture grimpe en flèche. À l’échelle nationale, ces règles expliquent pourquoi la majorité des héritages en ligne directe passent sous les radars fiscaux, tandis que les transmissions entre frères et sœurs peuvent se transformer en épreuve budgétaire.

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Pourquoi certains ne paient rien… et d’autres paient lourd
Deux frères partagent l’héritage d’une sœur. L’un reçoit 12 000 euros, l’autre 40 000 euros. Le premier n’a rien à régler, le second voit partir une bonne partie de sa part aux impôts. Ce scénario, très courant, découle du seuil d’abattement. Si la part héritée reste sous les 15 932 euros, pas un centime ne revient à l’État. Mais au-delà, chaque euro compte et le barème s’applique sans pitié.
Le nombre d’héritiers, le montant global du patrimoine, la nature des biens à partager, tout pèse dans la balance. Parfois, la vente d’un bien commun (une maison, une terre) fait franchir la ligne rouge. Et là, la fiscalité frappe fort. Les familles nombreuses, souvent, voient l’impôt dilué car la part de chacun diminue. À l’inverse, si le cercle familial est restreint, chaque héritier reçoit plus et s’expose à une taxation plus lourde.
Des exceptions qui changent tout : l’exonération totale sous conditions
Dans de rares cas, la loi prévoit une exonération complète de droits de succession entre frères et sœurs. Il faut remplir trois critères cumulativement : vivre sous le même toit que le défunt depuis cinq ans au moins avant le décès, être célibataire, veuf, divorcé ou séparé de corps, et avoir plus de 50 ans ou être en situation de handicap. Cette dérogation, peu connue, sauve parfois des héritiers modestes d’un impôt insupportable.
Mais attention : le fisc se montre pointilleux sur la preuve de résidence commune et la situation familiale. Les dossiers incomplets ou imprécis se voient souvent refuser l’exonération. Dans la grande majorité des cas, la règle de base s’applique : abattement réduit, forte taxation.
Comparatif : qui paie quoi ?
| Héritier | Abattement | Taux d’imposition |
|---|---|---|
| Enfant, parent | 100 000 € | 5 % à 45 % |
| Conjoint, partenaire PACS | Exonération totale | 0 % |
| Frère, sœur | 15 932 € | 35 % (jusqu’à 24 430 €), 45 % au-delà |
| Neveu, nièce | 7 967 € | 55 % |
| Autre parent, ami | 1 594 € | 60 % |
Optimiser la transmission : les outils à connaître
Pour limiter la facture, certains dispositifs existent, mais tous ne sont pas accessibles entre frères et sœurs. Les donations anticipées, renouvelables tous les 15 ans, permettent d’utiliser à nouveau l’abattement – mais entre frères et sœurs, le plafond reste le même : 15 932 euros par donation et par bénéficiaire. Rien à voir avec la générosité du système en ligne directe.
- Assurance-vie : souvent citée comme solution, l’assurance-vie permet d’avantager un bénéficiaire, mais la fiscalité reste lourde si ce n’est pas un enfant ou un conjoint.
- Démembrement de propriété : technique plus complexe, transmettre la nue-propriété en conservant l’usufruit peut alléger l’impôt, mais l’intérêt est limité entre frères et sœurs.
- Présents d’usage : ces cadeaux ponctuels ne sont pas taxés s’ils restent proportionnés au patrimoine et au revenu du donateur. Encore faut-il qu’ils soient faits du vivant et en respectant certains usages.

Le recours à un notaire ou à un conseiller fiscal s’avère souvent nécessaire, car la moindre erreur de déclaration peut coûter cher, que ce soit en droits ou en pénalités.
Réforme 2025 : quels changements pour les successions modestes ?
À partir de la fin 2025, une nouvelle donne s’impose sur les frais bancaires liés aux successions. Pour les petits héritages (moins de 5 910 euros), plus aucun frais ne sera prélevé par la banque : une mesure qui vise les familles modestes, souvent pénalisées par des frais parfois supérieurs à l’héritage lui-même.
Pour les successions plus élevées, les frais seront plafonnés à 1 % du montant transmis. Seules les situations complexes (biens à l’étranger, crédits en cours, indivisions litigieuses) échappent à cette gratuité, mais même là, le plafond du 1 % s’applique. Cette réforme ne modifie pas le barème fiscal, mais soulage nombre d’héritiers d’une charge supplémentaire.
Pourquoi ce système reste inégalitaire ?
La fiscalité successorale française affiche une façade sévère : taux élevés, barèmes progressifs, abattements qui varient du simple au sextuple selon le lien de parenté. Mais la réalité : moins de 15 % des successions, toutes catégories confondues, donnent lieu à un paiement effectif d’impôt. Les enfants, les conjoints, les partenaires de PACS profitent des abattements et des exonérations. Les frères et sœurs, eux, se retrouvent dans un angle mort fiscal, souvent sans solution d’optimisation.
Cette différence nourrit un sentiment d’injustice. Beaucoup découvrent, au moment du décès, que l’héritage d’un frère ou d’une sœur va fondre d’un tiers ou de moitié, sans moyen d’y échapper, sauf à remplir les conditions très restrictives d’exonération. Les contestations ne manquent pas, mais le système, pour l’instant, tient bon. Les débats politiques sur une réforme plus équitable ressurgissent régulièrement, sans aboutir à un véritable consensus.
FAQ pratique : héritage entre frère et sœur, vos questions
Quels sont les cas où un frère ou une sœur ne paie aucun impôt ?
Lorsque la part héritée reste sous les 15 932 euros d’abattement, il n’y a rien à régler. L’exonération totale existe si le bénéficiaire a vécu avec le défunt au moins cinq ans, est célibataire (ou veuf, divorcé), et a plus de 50 ans ou est en situation de handicap.
Quels documents pour bénéficier de l’exonération totale ?
Pièces d’identité, justificatifs de domicile commun sur cinq ans, attestation de non-remariage, preuve d’âge ou de handicap. Tout doit être complet, sinon l’exonération est refusée.
Peut-on transmettre plus en utilisant des donations ou une assurance-vie ?
Entre frères et sœurs, les abattements restent faibles sur les donations (15 932 € tous les 15 ans). L’assurance-vie, fiscalement intéressante pour le conjoint ou les enfants, n’offre pas d’avantage notable entre collatéraux.
Les frais bancaires sur succession sont-ils plafonnés ?
À partir de 2025, oui. Pour les héritages de moins de 5 910 euros, gratuité totale. Au-delà, plafonnement à 1 % sauf succession complexe.
Comment limiter l’impôt lors d’un héritage entre frère et sœur ?
Anticiper reste la meilleure solution : donations régulières dans la limite de l’abattement, rédaction d’un testament, consultation d’un notaire pour explorer d’éventuelles niches fiscales ou techniques adaptées à la situation familiale.
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[1] Impôt
L’impôt est une somme d’argent que les citoyens et les entreprises paient régulièrement au gouvernement. Cet argent est utilisé pour financer des services publics comme les écoles, les routes, et…
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Vous avez oubliez un cas si votre frere est handicape suite a un accident et qu il decede. Et qu il est indemnise avec la loi Badinter du 5 juillet 1985. Les freres et soeurs et parents ne paieront aucun droit de succession.