Faut-il continuer à conduire seul après 72 ans ? La question se pose pour de nombreux seniors, alors que les années passent et que la vigilance diminue. Aucun texte de loi ne fixe d’âge limite pour rendre le permis, mais le doute s’installe : réflexes moins rapides, vue qui baisse, trajets plus stressants.
En 2024, les plus de 65 ans représentaient 27 % des personnes tuées sur la route, selon l’ONISR, tout en ne formant que 21 % de la population. En France, le permis reste valable à vie, sans contrôle médical obligatoire, contrairement à plusieurs pays européens.
Pourtant, la conduite reste pour beaucoup un symbole d’indépendance et de liberté. Dans cet article, découvrez les 7 signes qui doivent alerter, et comment savoir s’il est temps, ou non, de laisser le volant.
Les signes qui doivent alerter : quand faut-il s’arrêter ?
Ni l’âge, ni la date du dernier anniversaire ne devraient décider. Ce sont les signaux physiques, cognitifs, comportementaux qui imposent de ralentir, parfois d’arrêter. Difficile d’admettre qu’on n’est plus le conducteur qu’on a été. L’enjeu, pourtant, dépasse la simple prudence individuelle.
1. Troubles cognitifs, même discrets
La première alerte vient souvent du cerveau. Les chercheurs de l’université de Washington l’ont montré : dès les premiers signes d’oubli, d’inattention, de difficulté à traiter plusieurs informations en conduisant, la sécurité vacille. Les tests cognitifs comme le PACC (Preclinical Alzheimer[1] Cognitive Composite) permettent de mesurer ce déclin, mais la réalité quotidienne suffit souvent : confusion devant des priorités, hésitation aux intersections, difficulté à adapter sa conduite à un imprévu.

2. Affections médicales incompatibles avec la conduite
Certains diagnostics doivent sonner comme une alarme. Maladies cardiovasculaires (insuffisance coronarienne, bradycardie), accidents vasculaires cérébraux (AVC[2]), maladies neurologiques (épilepsie, sclérose en plaques, maladie de Parkinson), troubles métaboliques graves (diabète déséquilibré), dépendance[3] à l’alcool ou aux drogues. L’arrêté du 28 mars 2022 liste précisément ces pathologies. L’acuité visuelle aussi compte : en dessous de 5/10, la conduite devient interdite.
Bon à savoir
En cas de maladie pouvant affecter la conduite (AVC, infarctus, troubles cognitifs, etc.), une visite médicale auprès d’un médecin agréé par le préfet est obligatoire.
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3. Médicaments altérant l’attention ou la coordination
Antidépresseurs, anxiolytiques, traitements contre l’épilepsie ou certains antidouleurs : la liste des médicaments signalés par un pictogramme jaune ou rouge s’allonge chaque année. Mauvais réflexes, somnolence, vision brouillée. Parfois, la prise médicamenteuse est temporaire. Mais quand elle s’installe dans le quotidien, le risque devient permanent. Un pharmacien, un médecin peuvent objectiver l’incapacité.
4. Dégradation des sens : vue, ouïe, réflexes
- La baisse de la vue rend moins lisibles panneaux et feux, rend difficile la perception des piétons ou cyclistes en périphérie.
- Une ouïe affaiblie fait passer inaperçues sirènes et avertisseurs sonores, augmente le risque sur les carrefours ou lors des dépassements.
- Le ralentissement des réflexes allonge la distance de freinage, retarde la réaction face à un obstacle soudain. Un quart de seconde de retard peut suffire à créer l’irréparable.
5. Difficultés attentionnelles ou erreurs répétées
Les seniors commettent en moyenne moins d’infractions, mais leurs erreurs sont différentes. Sorties de route sans raison valable, confusion entre l’accélérateur et le frein, oublis de priorité, hésitations prolongées devant un rond-point ou lors d’un dépassement. Un changement de comportement qui inquiète l’entourage doit être pris au sérieux.
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6. Perte de confiance ou refus d’adapter sa conduite
La peur au volant, la réticence à conduire la nuit ou sur autoroute, l’évitement de certains trajets. Ce sentiment d’insécurité est un signal d’alarme. Parfois, le refus d’admettre ses propres limites conduit à ignorer les évolutions du Code de la route, ou à refuser toute remise à niveau. Or, le Code change régulièrement, les habitudes doivent suivre.

7. Isolement progressif et repli sur soi
La conduite, c’est souvent la dernière grande liberté. Beaucoup de seniors redoutent l’isolement, la perte du lien social si la voiture disparaît. Ce sentiment pousse parfois à nier l’évidence. Pourtant, continuer à conduire seul malgré des signes objectifs de fragilité met en danger non seulement le conducteur, mais aussi tous les usagers de la route.
France et Europe : la question du contrôle médical
L’Europe pousse vers une harmonisation. À Bruxelles, on envisage une visite médicale tous les quinze ans pour tous les conducteurs, avec une attention accrue pour les seniors. En France, le débat reste vif : pour l’instant, le permis reste valable à vie, sauf décision médicale contraire. Mais la loi pourrait bientôt changer. D’autres pays ont déjà sauté le pas. L’Italie impose un contrôle dès 50 ans, le Portugal dès 40 ans. La France fait figure d’exception.
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Des solutions, pas de fatalité
Arrêter de conduire seul ne signifie pas renoncer à toute mobilité. Des stages de remise à niveau existent, en auto-école ou via les associations de prévention routière. Ils permettent de valider les acquis, de retravailler les bons réflexes, d’identifier objectivement ses points faibles. Parfois, organiser un accompagnement, partager la conduite avec un proche, opter pour les transports en commun ou les services de mobilité adaptés (taxis, transports à la demande) peut préserver l’autonomie sans mettre en péril la sécurité.
Les aides au transport pour continuer à bouger en toute sécurité
Perdre confiance au volant ne signifie pas renoncer à sa liberté de déplacement. En France, de nombreuses aides permettent aux seniors de rester mobiles sans conduire – que ce soit pour les courses, les rendez-vous médicaux ou les sorties culturelles.
Les collectivités locales proposent souvent des réductions ou la gratuité dans les transports en commun : le Pass Paris Senior ou le forfait Navigo Senior en Île-de-France, par exemple, facilitent les trajets quotidiens à moindre coût. En province, plusieurs réseaux (TCL à Lyon, TBM à Bordeaux, RTM à Marseille…) accordent aussi des tarifs préférentiels aux plus de 65 ans.
En zone rurale, où les bus sont rares, des transports à la demande complètent le réseau. Il suffit de réserver son trajet la veille : un minibus ou un taxi communal vient chercher le senior à domicile pour le déposer au marché, à la mairie ou chez le médecin.
Les associations de transport solidaire – comme Familles Rurales ou la Croix-Rouge Mobilités – offrent une alternative humaine et conviviale. Les bénévoles assurent les déplacements tout en créant un lien social précieux.
Enfin, les personnes en perte d’autonomie peuvent bénéficier d’un accompagnement individualisé par un service d’aide à domicile[4] ou via le programme Sortir Plus de l’Agirc-Arrco, qui finance les sorties des retraités isolés.
Ainsi, de nombreuses solutions existent pour continuer à se déplacer sans prendre de risque au volant. Pour découvrir ces dispositifs en détail et savoir comment en bénéficier, consultez notre panorama de l’aide au transport pour les personnes âgées.
Tableau récapitulatif : 7 signes à surveiller
| Signe d’alerte | Conséquence sur la conduite |
|---|---|
| Troubles cognitifs | Diminution de la réactivité, erreurs d’appréciation |
| Affections médicales graves | Perte de contrôle, malaise, arrêt inopiné |
| Médicaments à risque | Somnolence, réflexes altérés |
| Vue, ouïe, réflexes en baisse | Non perception du danger, allongement du temps de réaction |
| Erreurs répétées | Augmentation du risque d’accident |
| Perte de confiance | Stress, conduite hésitante, évitement |
| Isolement, repli sur soi | Refus d’aide, prise de risque accrue |
Questions fréquentes et conseils pratiques
À qui en parler en cas de doute sur ses capacités ?
Le médecin traitant reste le premier interlocuteur. Il peut évaluer objectivement, orienter vers un spécialiste ou recommander une remise à niveau.
Existe-t-il des alternatives à la conduite individuelle ?
Oui. Transports collectifs, covoiturage, taxis, services municipaux adaptés aux seniors, solutions de mobilité partagée se développent en ville comme à la campagne.
Quelles démarches en cas de maladie incompatible avec la conduite ?
Le conducteur doit déclarer sa situation à la préfecture. Un avis médical déterminera la suspension, l’aménagement ou le retrait du permis.
Mon assurance peut-elle refuser de m’indemniser en cas d’accident lié à l’âge ?
Non. L’âge en lui-même n’est jamais un motif d’exclusion. En revanche, si une maladie ou un trouble médical rend la conduite incompatible avec le permis, et que le conducteur n’a pas passé la visite médicale obligatoire, l’assureur peut refuser l’indemnisation.
Autrement dit, en cas d’accident lié à une pathologie connue (ex. épilepsie, troubles cognitifs, AVC récent), la garantie peut être suspendue ou annulée.
Peut-on se faire accompagner pour reprendre confiance ?
Des stages dédiés aux seniors sont proposés par de nombreuses auto-écoles et associations. Ils permettent d’identifier ses points faibles en toute sécurité.
Personne n’a envie d’entendre qu’il doit s’arrêter de conduire. Pourtant, la lucidité, le dialogue avec les proches, un bilan médical régulier, restent les meilleurs remparts contre l’accident. Il ne s’agit pas de stigmatiser les seniors, mais de préserver leur autonomie et la sécurité de tous. Les signes ne trompent pas. Savoir les écouter, c’est choisir la liberté autrement.
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[1] Alzheimer
La maladie d’Alzheimer est une maladie qui affecte le cerveau, entraînant des pertes de mémoire et des difficultés à penser clairement, rendant progressivement les tâches quotidiennes plus difficiles.
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[2] AVC
Un AVC, ou accident vasculaire cérébral, se produit lorsque le flux sanguin vers une partie du cerveau est bloqué, ce qui peut provoquer des problèmes de mouvement, de langage, ou…
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[3] Dépendance
La dépendance de la personne âgée désigne le besoin d’aide pour réaliser les tâches de la vie quotidienne en raison de problèmes physiques ou mentaux.
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[4] Aide à domicile
L’aide à domicile est un service qui accompagne les personnes chez elles en leur apportant une assistance pour les tâches de la vie courante, comme le ménage, les courses, ou…
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J’ai 89 ans bientôt, je ne conduis plus pour ne pas être tenté j’ai venduma voiture. Pour me déplacer j’ai les transports solidaires c’est très bien
Très bonne initiative ! Pour éviter les accidents