La démence peut s’installer doucement, effaçant peu à peu les souvenirs, le jugement, l’orientation. Alzheimer[1], démence à corps de Lewy, démence vasculaire… autant de formes différentes, une même perte progressive d’autonomie. Pour les proches, chaque oubli, chaque désorientation est un défi, un moment d’inquiétude et parfois de doute. Au quotidien, il est difficile de distinguer l’âge normal de la maladie.

Dans cet article, nous vous donnerons des repères pour reconnaître ces signes, comprendre ce qui se passe et accompagner vos proches avec confiance et sérénité, sans vous sentir seuls face à la situation.

Sous la surface : les symptômes qui doivent inquiéter

Certains signes frappent d’abord la mémoire récente : des événements oubliés, des rendez-vous manqués, des objets égarés. Puis, la confusion s’invite: questions répétées, difficulté à lire ou à suivre une conversation, hésitation sur les mots. À table, la fourchette devient “ce truc”, le prénom du petit-fils échappe.

  • Perte de repères spatio-temporels : ne plus savoir quel jour on est, se perdre dans un quartier autrefois familier.
  • Changements de comportement : apathie soudaine, irritabilité, crises d’angoisse nocturnes ou agitation inexpliquée.
  • Difficulté à accomplir les gestes simples : cuisiner, gérer ses papiers, même s’habiller devient difficile.
  • Langage perturbé : mots inadaptés, phrases inachevées, recherche des termes les plus simples.
  • Jugement altéré : décisions incohérentes, actions inadaptées (sortir alors qu’il gèle, donner de l’argent à des inconnus).
senior atteinte d'Alzheimer et faisant une crise d'agressivité

Le trouble s’exprime aussi par le corps : troubles de l’équilibre, chutes répétées, difficultés à marcher, perte de poids rapide. Parfois, la nuit s’inverse : éveil, agitation, déambulation nocturne.

Quand la crise éclate : aggravation aiguë et signaux d’alerte

Une “crise” de démence, ce n’est pas un orage prévisible. Plutôt une aggravation rapide et inhabituelle : confusion subite, agitation, refus de s’alimenter, hallucinations. Le parent ne reconnaît plus la maison, ni même les visages aimés. Soudain, il ne sait plus utiliser son téléphone ; il crie, s’énerve, se replie. Un comportement qui explose sans raison apparente.

Derrière ces épisodes, souvent, un déclencheur : infection urinaire, douleur sourde, fièvre, changement de médicament ou d’environnement, hospitalisation récente. Parfois, une simple constipation suffit à tout bouleverser.

  • Chutes ou troubles moteurs soudains
  • Refus brutal de soins ou d’alimentation
  • Déambulation, cris, gestes inadaptés
  • Hallucinations, idées délirantes, agressivité
  • Incontinence[2] non expliquée

Dans ces moments, une consultation rapide s’impose. La crise cache parfois une cause réversible. Infections, déséquilibres biologiques, médicaments inadaptés : chaque facteur compte.

Reconnaître la démence : vieillissement, dépression ou pathologie ?

La distinction peut être difficile. Le vieillissement normal se traduit par des oublis passagers, comme un nom que l’on retrouve ensuite ou une confusion passagère sur le jour, sans perte d’autonomie. Avec la démence, la mémoire récente diminue de manière persistante, l’autonomie recule et le comportement peut changer. La dépression, souvent confondue avec la démence, provoque des plaintes de mémoire, mais les souvenirs essentiels restent accessibles ; l’humeur, l’appétit et le sommeil sont modifiés, et l’évolution diffère.

Les proches peuvent retarder la prise de conscience. Le conjoint peut couvrir les oublis, finir les phrases ou trouver des excuses. Le parent lui-même peut nier ou cacher ses difficultés, par peur de devoir aller en maison de retraite. Certaines personnes très instruites compensent plus longtemps leurs troubles, retardant encore la détection de la maladie.

Pourquoi les symptômes de démence passent inaperçus

Le début de la démence est souvent discret. Des changements subtils apparaissent, comme un désintérêt pour les activités habituelles, un repli sur soi ou un refus de sortir ou de recevoir, souvent justifié par la fatigue ou l’ennui. Derrière ces comportements se cachent la peur du diagnostic et le désir de rester à domicile. L’anosognosie, soit l’absence de conscience de sa propre maladie, touche environ huit personnes sur dix atteintes d’Alzheimer, rendant le trouble encore plus difficile à détecter.

La vigilance des proches devient essentielle. Il est utile de noter les incidents, même mineurs, sur plusieurs semaines. Oublier un anniversaire peut être anodin, mais oublier quotidiennement de prendre ses médicaments ou d’éteindre le gaz représente un vrai risque pour la sécurité.

senior diagnostiquée avec une démence

Diagnostic : quand et comment agir ?

Si les troubles de mémoire se répètent ou s’aggravent, il est essentiel de consulter. Le médecin, neurologue ou gériatre réalise un examen clinique et des tests cognitifs, parfois complétés par des analyses sanguines ou une imagerie cérébrale. L’objectif est de détecter les causes réversibles comme des carences, infections ou effets secondaires de médicaments, et de différencier la démence d’autres troubles. Certains traitements peuvent ralentir l’évolution et soulager les symptômes, mais seules les formes secondaires peuvent être guéries.

L’accompagnement au quotidien est tout aussi important : maintenir des routines stables, sécuriser l’environnement et proposer une stimulation adaptée aide à préserver l’autonomie. Le soutien des aidants est également crucial, car ils peuvent se retrouver rapidement épuisés ou isolés.

Tableau récapitulatif : signes clés d’une crise de démence

Symptômes observésSignification possibleAction recommandée 
Confusion aiguë, désorientationDécompensation, syndrome confusionnelConsulter rapidement
Agitation, agressivité, crisDéclencheur externe possible (douleur, infection)Recherche de cause médicale
Hallucinations, délires soudainsDémence à corps de Lewy ? Délirium ?Évaluation médicale urgente
Chute, troubles moteurs inéditsDémence vasculaire, AVC[4], effet secondaireAppel au médecin
Refus de manger, incontinenceDégradation globale, trouble aiguBilans complémentaires

Questions fréquentes des familles

Est-ce que la démence se soigne ? 

Non, sauf formes secondaires. Les traitements ralentissent les symptômes ou les atténuent.

Quelle différence entre Alzheimer et démence ? 

Alzheimer est la forme la plus fréquente de démence, mais il en existe d’autres.

Un parent dépressif peut-il vraiment devenir dément ? 

La dépression[3] peut mimer ou accompagner la démence, mais elle n’en est pas la cause directe.

Faut-il parler du diagnostic au parent ? 

Oui, avec tact. Adapter l’information à ce qu’il peut comprendre et entendre.

Quels professionnels consulter ? 

Médecin traitant, neurologue, gériatre. Pour l’accompagnement, contacter aussi les associations et services sociaux spécialisés.

Conseils pratiques : soutenir sans s’épuiser

  • Observer sur la durée, noter les changements et incidents
  • Maintenir une routine stable, des repères visuels et lumineux
  • Éviter les conflits, expliquer posément chaque geste
  • Adapter l’environnement : sécurité, chemin lumineux, objets familiers
  • Encourager l’autonomie pour les tâches simples
  • Solliciter l’aide de professionnels, ne pas rester seul face à la maladie
  • Prendre soin de soi en tant qu’aidant, demander du répit

Ressources et accompagnement

  • Associations Alzheimer, plateformes de répit
  • Services sociaux, aides à domicile, accueil de jour
  • Conseillers spécialisés en gérontologie[5]
  • Annuaire des EHPAD[6], dispositifs de soutien aux aidants

Reconnaître une crise de démence, c’est apprendre à lire les signes derrière les gestes, derrière le silence. Repérer ce qui change, ce qui s’accélère, ce qui s’aggrave. Agir vite, demander de l’aide, ne pas s’isoler. Parce que chaque jour compte, chaque détail pèse dans l’équilibre de votre parent. Un regard attentif, une réaction précoce, peuvent faire toute la différence.

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1 Commentaire

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  1. Sally Bougdal

    Merci beaucoup pour toutes ces notions

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