L’Aide Sociale à l’Hébergement (ASH) représente un soutien financier précieux pour de nombreuses personnes âgées ou handicapées qui ne peuvent pas assumer seules leurs frais d’hébergement en établissement. Mais cette solidarité a un prix : le remboursement après décès sur la succession. Pour les familles concernées, comprendre quels biens peuvent être réclamés par l’administration est essentiel pour anticiper l’impact sur l’héritage. Entre patrimoine immobilier, placements financiers et donations antérieures, les règles de récupération touchent une grande partie de la succession, avec des nuances importantes à connaître.
L’Aide Sociale à l’Hébergement : principes et fonctionnement
L’Aide Sociale[1] à l’Hébergement constitue un dispositif de solidarité destiné aux personnes dont les ressources sont insuffisantes pour couvrir les frais liés à leur hébergement en établissement spécialisé ou en accueil familial. Cette aide, gérée par les départements, intervient de façon subsidiaire, c’est-à-dire après épuisement des ressources personnelles et sollicitation des obligés alimentaires.
Qui peut bénéficier de l’ASH ?
L’ASH s’adresse principalement à deux catégories de population :
- Les personnes âgées de plus de 65 ans (ou 60 ans en cas d’inaptitude au travail)
- Les personnes en situation de handicap accueillies en établissement
Pour être éligible, le demandeur doit résider en France de façon stable et régulière, et ses ressources doivent être insuffisantes pour couvrir ses frais d’hébergement.
Comment fonctionne le calcul de l’aide ?
Le montant de l’ASH correspond à la différence entre :
- Le coût total de l’hébergement
- La participation du résident (90% de ses revenus)
- La contribution éventuelle des obligés alimentaires
Le bénéficiaire conserve à sa disposition une somme minimale mensuelle, appelée « argent de poche », équivalente à 10% de ses ressources, avec un minimum fixé à 110 euros par mois en 2025.

La récupération sur succession : un principe fondamental de l’ASH
Contrairement à d’autres aides comme l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) ou la Prestation de Compensation du Handicap (PCH), l’ASH est récupérable sur la succession du bénéficiaire après son décès. Ce principe de récupération constitue une caractéristique essentielle de cette aide.
La récupération s’effectue sur l’actif net successoral, c’est-à-dire la valeur des biens transmis après déduction des dettes et frais funéraires. Le département peut réclamer le remboursement des sommes avancées dans la limite de cet actif net, sans pouvoir exiger des héritiers qu’ils paient sur leurs deniers personnels.
Les conseils départementaux disposent d’un délai de 5 ans à compter du décès pour exercer cette action en récupération. Toutefois, ce délai est réduit à 6 mois si la succession a fait l’objet d’une déclaration auprès de l’administration fiscale.
En savoir plus sur les 3 astuces légales pour éviter de rembourser l’ASPA
Quels biens sont concernés par le remboursement de l’ASH ?
La récupération de l’ASH peut s’exercer sur différents types de biens composant le patrimoine du défunt. Examinons en détail les catégories de biens concernés.
Les biens immobiliers
Tous les biens immobiliers faisant partie de la succession sont susceptibles d’être saisis pour rembourser l’ASH :
- La résidence principale
- Les résidences secondaires
- Les terrains constructibles ou non
- Les biens locatifs
La valeur retenue est généralement celle du marché au moment du décès. Le département peut demander la vente de ces biens pour récupérer sa créance, sauf dans certains cas d’exception que nous verrons plus loin.
Les biens mobiliers
L’ensemble des biens mobiliers entre dans l’assiette de récupération :
- Comptes bancaires et livrets d’épargne
- Placements financiers (actions, obligations, etc.)
- Véhicules
- Bijoux et objets de valeur
- Mobilier (au-delà d’une certaine valeur)
Ces biens sont évalués selon leur valeur au jour du décès, conformément aux règles fiscales applicables aux successions.

Les donations effectuées par le bénéficiaire
Les donations consenties par le bénéficiaire de l’ASH avant ou après sa demande d’aide peuvent faire l’objet d’une récupération. Sont concernées :
- Les donations notariées
- Les donations manuelles déclarées
- Les dons d’usage d’une valeur significative
Le département peut exercer un recours contre les donataires, dans la limite de la valeur des biens donnés, évaluée au jour de la récupération. Attention, il n’existe pas de délai de prescription pour les donations effectuées postérieurement à la demande d’ASH ou dans les 10 ans précédant cette demande.
L’assurance-vie : un cas particulier
Les contrats d’assurance-vie souscrits par le bénéficiaire de l’ASH peuvent faire l’objet d’une récupération, mais selon des modalités spécifiques :
- Pour les primes versées après 70 ans : récupération possible dans les mêmes conditions que pour les autres biens
- Pour les primes versées avant 70 ans : elles ne sont pas concernées par la récupération, sauf si elles étaient abusives et servaient clairement à vider la succession pour éviter le recouvrement
La récupération s’exerce auprès des bénéficiaires désignés dans les contrats d’assurance-vie, dans la limite du montant des primes versées par le souscripteur après ses 70 ans et au prorata des sommes versées à chacun d’eux.
Les limites et exceptions à la récupération
Le législateur a prévu plusieurs situations où la récupération est limitée ou exclue, afin de protéger certains héritiers ou de préserver certains biens.
Récupération de l’ASH : dès le premier euro
Contrairement à d’autres dispositifs d’aide sociale, l’aide sociale à l’hébergement (ASH) est récupérable sur la succession dès le premier euro d’actif net. Autrement dit, aucun montant minimal n’est requis pour que le département exerce un recours après le décès du bénéficiaire.
À titre de comparaison, certaines aides, comme l’ASPA ou l’aide sociale à domicile, ne sont récupérées que si l’actif successoral dépasse un seuil fixé par la loi.
Aide sociale | Seuil de récupération | Abattement applicable |
|---|---|---|
ASH (hébergement en établissement) | ❌ Aucun seuil : récupération dès le premier euro | ❌ Aucun abattement prévu |
Aide sociale à domicile (aide-ménagère) | ✔️ 46 000 € d’actif net | ✔️ Seules les dépenses supérieures à 760 euros, et pour la part excédant ce montant, peuvent donner lieu à recouvrement auprès des héritiers de sang, ainsi que des légataires universels et à titre universel ❌ Récupérable dès le premier euro pour les légataires particuliers et les donataires |
ASPA (retraite minimum) | ✔️ 107 616 € (métropole) ✔️ 150 000 € (en Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion) | ❌ Aucun abattement prévu |
💡 L’ASH est donc la plus exigeante des aides sociales en matière de récupération successorale. Il est recommandé de se rapprocher du Conseil départemental pour anticiper l’impact de cette mesure sur le patrimoine familial.
Héritiers protégés : ce que dit réellement la loi
La protection des héritiers face à la récupération de l’aide sociale dépend du type de bénéficiaire : personne âgée ou personne en situation de handicap. Seules ces dernières bénéficient d’un encadrement légal spécifique.
♿ Pour les personnes en situation de handicap
L’article L.344-5 du Code de l’action sociale et des familles prévoit que la récupération de l’aide sociale n’a pas lieu si les héritiers sont :
- le conjoint du défunt,
- ses enfants,
- ses parents,
- ou une personne ayant assumé de manière effective et constante la charge de l’ancien allocataire.
📌 Aucune récupération ne peut être exercée dans ce cas, y compris sur un légataire, un donataire ou un bénéficiaire de contrat d’assurance-vie.
🧓 Pour les personnes âgées bénéficiaires de l’ASH
En revanche, aucune protection légale n’est prévue pour les héritiers d’une personne âgée.
La récupération peut donc s’exercer :
- sur le conjoint survivant,
- sur les enfants,
- dès le premier euro de l’actif net successoral.
👉 Certains départements peuvent toutefois décider, à titre discrétionnaire, de reporter le recouvrement.
Par exemple, dans la Loire :
« Le Président du Département peut décider de reporter le recouvrement de tout ou partie de la créance, au décès du conjoint survivant ou de l’héritier, notamment lorsque celui-ci habite un bien immobilier entrant dans la succession. »
L’Aide Sociale à l’Hébergement répond à un besoin social crucial en permettant aux personnes aux ressources limitées d’accéder à un hébergement adapté. Cependant, son caractère récupérable sur succession en fait une aide à double tranchant pour les familles soucieuses de préserver leur patrimoine.
Entre biens immobiliers, placements financiers, donations et assurances-vie, peu d’éléments échappent à cette récupération, même si des protections existent pour certains héritiers. Face à ce dispositif complexe, une anticipation et une information précise sont indispensables pour les familles concernées. Les alternatives à l’ASH méritent d’être explorées, tout comme les possibilités de recours et d’aménagement en cas de demande de remboursement.
Questions fréquentes
La récupération ASH peut-elle être évitée ?
Oui, par anticipation :
- donations bien en amont (>10 ans),
- contrats d’assurance-vie bien structurés en amont (attention, s’ils sont abusifs, ils pourraient être requalifiés en donations),
- recours à d’autres aides non récupérables comme l’APA ou l’aide au logement[2],
- location ou vente d’un bien.
Peut-on refuser l’héritage pour éviter la récupération ?
Oui, un héritier peut renoncer à la succession, mais cela ne protège pas forcément les autres héritiers ou donataires.
Quelles aides ne sont pas récupérables ?
L’APA, la PCH et certaines aides de caisses de retraite complémentaire ne sont pas soumises à récupération.
-
[1] Aide Sociale
L’aide sociale est une assistance financière fournie par l’État pour aider les personnes en difficulté à couvrir des besoins essentiels, comme le logement ou les soins en établissement.
-
[2] Aide au logement
L’aide au logement est une aide financière destinée à aider les personnes à faibles revenus à payer leur loyer ou les frais liés à leur logement.
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Bonjour,
Ma question porte sur la succession de l’ASH d’une personne décédée.
Le département réclame la moitié de l’assurance obsèques qui a servi à payer son enterrement.
Est-ce légal, je sais que c’est possible sur une assurance vie, mais je n’avais pas cette notion pour l’assurance obsèques.
Merci pour votre avis.
Cordialement
Bonjour
Je vous remercie pour votre commentaire.
Il est préférable de vous renseigner auprès d’un notaire ou du service d’aide juridique du département.
Bonne journée.
Amandine