La nuit tombe, la maison se calme. Pourtant, pour bien des familles, le répit ne vient pas. Un proche touché par la maladie d’Alzheimer[1], qui erre dans le couloir, se relève, parle ou crie, multiplie les réveils. Cette réalité, beaucoup la vivent sans toujours savoir s’il s’agit d’un symptôme habituel ou d’un signal d’alarme. Les troubles du sommeil chez les personnes atteintes d’Alzheimer ne relèvent pas de l’exception. Ils marquent, au contraire, le quotidien de nombreux malades et de leurs aidants. Fatigue, inquiétude, désorientation nocturne, agitation — le sommeil s’effiloche, la vigilance des aidants ne faiblit jamais vraiment. Pourquoi ces nuits hachées, et surtout, comment les rendre moins éprouvantes ? Focus sur le problème et sur sept leviers pratiques pour retrouver, ensemble, des nuits plus sereines.

Pourquoi dort-on mal avec Alzheimer ? Le point sur les troubles nocturnes

Sommeil difficile, réveils fréquents, confusion sur les horaires : ces perturbations ne relèvent pas du hasard. Dès les premiers stades de la maladie d’Alzheimer, le cerveau perd ses repères temporels. L’alternance veille-sommeil s’effrite. On observe des réveils en sursaut, des déambulations nocturnes, parfois une inversion du rythme — la personne dort le jour, veille la nuit. Des épisodes d’angoisse ou de peur surviennent sans raison apparente, la chambre devient méconnaissable, la notion du temps s’efface.

Les chiffres confirment l’ampleur du phénomène : plus de la moitié des malades Alzheimer présentent des troubles du sommeil. Cette dégradation ne concerne pas seulement la quantité de sommeil, mais surtout sa qualité. Le sommeil profond, réparateur, se fait rare. 

Conséquence : la fatigue s’accumule, la mémoire flanche, l’attention se brouille, le risque de chute grimpe. Les nuits hachées accélèrent parfois l’évolution de la maladie, en favorisant l’accumulation des protéines toxiques dans le cerveau.

senior Alzheimer prenant des médicaments contre les troubles du sommeil

Quelles causes derrière ces nuits fragmentées ?

Derrière chaque nuit difficile, des causes multiples s’entremêlent. La maladie altère les zones cérébrales qui régulent le sommeil. L’environnement joue aussi : bruits, lumière, température inadéquate, chambre encombrée, tout devient source de stress.

L’anxiété, la tristesse, la solitude, parfois la douleur ou l’inconfort digestif, s’invitent au coucher. Certains médicaments, prescrits pour d’autres symptômes, aggravent l’insomnie ou provoquent des envies d’uriner qui réveillent la nuit. D’autres pathologies (apnée du sommeil, syndrome des jambes sans repos, infections urinaires) viennent s’ajouter au tableau.

Face à cette complexité, l’aidant doit composer avec une vigilance constante. Veiller, réconforter, sécuriser la maison, parfois jusqu’à l’épuisement. Près d’un tiers des aidants souffrent eux-mêmes de troubles du sommeil, conséquence directe de cette charge invisible.

LIRE AUSSI : Ce que cachent réellement les troubles du sommeil des seniors

Les risques d’un mauvais sommeil : bien plus qu’une simple fatigue

Nuit après nuit, un sommeil de mauvaise qualité pèse lourdement. 

  • Chez le malade : perte d’équilibre, chutes, confusion accrue au réveil. L’état général se dégrade, le risque d’hospitalisation augmente, la fatigue devient chronique. 
  • Chez l’aidant : irritabilité, anxiété, maladies cardiovasculaires à la longue. Les nuits blanches favorisent le stress, la tension dans la relation, jusqu’à parfois précipiter le placement en institution.

Sept solutions pour des nuits plus paisibles

Aucun remède miracle, mais des gestes simples, répétés, adaptés à chaque foyer. Sept leviers, validés par les recommandations médicales, pour limiter les insomnies et sécuriser la nuit.

Maintenir une routine stricte et rassurante

Coucher et lever à heure fixe, repas et activités programmés, rituels doux avant la nuit : lecture, musique, boisson chaude — la régularité rassure, structure le temps et apaise l’angoisse de la tombée du jour. Les signaux sont clairs, répétitifs, pour ancrer la notion de nuit.

senior ayant une routine de lecture avant de dormir

Adapter la chambre et l’environnement

Température fraîche, pas de surchauffe ni de courant d’air. Un lit confortable, une pièce rangée, pas d’objets dangereux. Lumière douce, rideaux occultants, literie adaptée aux besoins. Réserver la chambre au sommeil, pas d’activités stimulantes au lit. Un environnement sécurisé limite les risques de chute ou d’errance.

Encourager l’activité physique et cognitive en journée

Marche, gymnastique douce, jardinage, jeux de mémoire : l’activité fatigue naturellement, stabilise l’horloge biologique. Éviter l’exercice intense après 17h, mais maintenir une mobilisation régulière pour préparer le corps au repos.

Gérer la lumière, le jour comme la nuit

Sorties le matin, fenêtres grandes ouvertes, luminothérapie si besoin. Le soir, lumière tamisée, pas d’écrans lumineux. La lumière naturelle synchronise le rythme veille-sommeil. En cas de lever nocturne : veilleuse douce, lumière rouge, jamais de lumière vive qui réveille complètement le cerveau.

Limiter les siestes et contrôler les excitants

Une seule sieste courte après le déjeuner, pas de sieste en fin d’après-midi. Café, thé, chocolat, sodas, alcool : à éviter après 16h. Dîner léger, 2 à 3 heures avant le coucher. Boire peu le soir pour limiter les réveils liés à la vessie.

Installer des aides à l’orientation et à la sécurité

Panneaux phosphorescents vers la salle de bain, veilleuse automatique, tapis antidérapant, barrière de lit si besoin. Enlever les vêtements de jour pour éviter de s’habiller la nuit. Mettre une chaise percée, un verre d’eau à portée de main pour éviter les déplacements risqués.

Prendre soin aussi de l’aidant

Routine apaisante le soir, éviter les écrans et les discussions difficiles avant de dormir. Techniques de relaxation, lecture douce, méditation. Utilisation d’un babyphone ou d’une sonnette pour être alerté seulement si nécessaire. Si la fatigue devient trop lourde, ne pas hésiter à solliciter un relais ou une aide extérieure.

Quand consulter ? Le rôle du médecin et l’importance du suivi

Si les nuits restent agitées malgré toutes les adaptations, un avis médical s’impose. Certains troubles cachent une infection, une douleur, un effet secondaire médicamenteux. Les somnifères classiques sont à éviter : ils majorent la confusion, le risque de chute, et ne règlent pas le problème de fond. Seul un professionnel pourra évaluer la situation globale et proposer, si besoin, une solution médicamenteuse adaptée.

Points-clés à retenir

  • Les troubles du sommeil chez les personnes atteintes d’Alzheimer sont fréquents, souvent intenses, mais peuvent s’atténuer avec des gestes simples et répétés.
  • Adapter l’environnement, instaurer des routines, surveiller l’alimentation et la lumière : autant d’axes pour retrouver des nuits moins éprouvantes.
  • Le bien-être de l’aidant compte autant que celui du malade. Solliciter de l’aide, s’accorder du repos, s’entourer de professionnels si besoin : une nécessité, non un luxe.
  • Face à des insomnies persistantes, le médecin reste un allié indispensable. Ne jamais hésiter à consulter.

Le sommeil, ce fil silencieux qui relie la nuit au jour, ne se répare pas d’un coup. Mais chaque geste compte. Chaque adaptation, chaque écoute, chaque routine apaisante, c’est déjà un pas vers des nuits plus douces — pour le malade, et pour ceux qui veillent à ses côtés.

FAQ : questions fréquentes autour du sommeil et d’Alzheimer

Pourquoi mon proche atteint d’Alzheimer dort-il parfois beaucoup en journée ?

La fatigue liée à la maladie, l’effort de concentration pour les tâches simples, la perte de repères diurnes expliquent ces phases de somnolence. Paradoxalement, ces siestes morcellent le sommeil nocturne.

Faut-il interdire les siestes ?

Non, mais il vaut mieux les limiter : une courte sieste après le déjeuner, jamais en fin de journée.

Quels dangers en cas de déambulation nocturne ?

Chutes, désorientation, fugue éventuelle. Sécuriser la maison, installer une barrière ou un système d’alerte peut prévenir ces risques.

La musique aide-t-elle à calmer le malade ?

Oui, une musique douce avant le coucher favorise la détente. Éteindre la musique une fois la personne apaisée pour ne pas gêner l’endormissement.

Quand penser à la consultation médicale ?

Si les troubles du sommeil s’aggravent, si la confusion devient trop importante, ou si vous suspectez une cause médicale associée (douleur, infection, apnée du sommeil).

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