Avez-vous remarqué que vos parents ou grands-parents se plaignent constamment d’avoir froid, même quand vous trouvez la température agréable ? Ce n’est pas dans leur tête. Les personnes âgées ressentent réellement le froid plus intensément que les jeunes adultes. Cette sensibilité accrue au froid n’est pas qu’une simple gêne – elle peut affecter profondément leur qualité de vie et même présenter des risques sérieux pour leur santé. Alors que l’hiver 2025 s’achève doucement, nombreux sont les seniors qui continuent de souffrir du froid, même à l’intérieur de leur domicile. Comprendre les mécanismes biologiques et environnementaux derrière cette sensibilité particulière est essentiel pour trouver des solutions adaptées et efficaces.

Les mécanismes physiologiques qui expliquent la sensibilité au froid

Le corps humain change considérablement avec l’âge, et plusieurs de ces modifications affectent directement notre capacité à maintenir une température corporelle confortable.

Un métabolisme qui tourne au ralenti

Avec l’âge, notre métabolisme basal – cette énergie que notre corps dépense au repos – diminue progressivement. Ce ralentissement métabolique signifie que les personnes âgées produisent naturellement moins de chaleur corporelle que les jeunes adultes. Cette baisse peut atteindre jusqu’à 20% entre 20 et 80 ans, ce qui explique en grande partie pourquoi les seniors ont plus souvent froid.

Cette diminution du métabolisme s’explique par plusieurs facteurs : la réduction de la masse musculaire, les changements hormonaux et la baisse générale d’activité physique qui accompagnent souvent le vieillissement.

L’hypothalamus : un thermostat qui perd en précision

Notre corps possède son propre thermostat interne : l’hypothalamus. Cette petite région du cerveau joue un rôle crucial dans la régulation de notre température corporelle. Avec l’âge, l’efficacité de l’hypothalamus diminue, rendant plus difficile la détection des changements de température et l’activation des mécanismes de thermorégulation.

Ce dysfonctionnement progressif explique pourquoi de nombreuses personnes âgées ne frissonnent pas aussi rapidement ou efficacement que les plus jeunes lorsqu’elles sont exposées au froid – leur corps ne réagit tout simplement pas aussi promptement aux baisses de température.

La perte d’isolation naturelle

Notre corps dispose de deux isolants naturels principaux : le tissu adipeux (graisse) et les muscles. Avec l’âge, ces deux éléments diminuent considérablement :

  • La sarcopénie, cette perte progressive de masse musculaire liée à l’âge, réduit la capacité du corps à générer de la chaleur.
  • La redistribution et parfois la diminution du tissu adipeux sous-cutané affaiblit notre barrière isolante naturelle.

Ces changements font que la chaleur s’échappe plus facilement du corps des personnes âgées, les rendant plus vulnérables aux températures basses.

Une circulation sanguine moins performante

La circulation sanguine joue un rôle essentiel dans la distribution de la chaleur à travers le corps. Malheureusement, le vieillissement s’accompagne souvent d’une détérioration progressive du système circulatoire :

  • Les vaisseaux sanguins perdent en élasticité.
  • La vasoconstriction (rétrécissement des vaisseaux sanguins périphériques en réponse au froid) devient moins efficace.
  • Les problèmes circulatoires comme l’artériosclérose limitent le flux sanguin vers les extrémités.
mains d'un senior avec une mauvaise circulation sanguine

Ces changements expliquent pourquoi de nombreuses personnes âgées ont constamment les mains et les pieds froids, même lorsque le reste de leur corps est à température normale.

Facteurs externes aggravant la sensation de froid

Au-delà des changements physiologiques inévitables, plusieurs facteurs comportementaux et environnementaux peuvent aggraver la sensation de froid chez les seniors.

L’impact des habitudes quotidiennes

Certaines habitudes de vie peuvent considérablement influencer la sensation de froid :

  • Alimentation inadaptée : une alimentation pauvre en calories et en nutriments essentiels prive le corps de l’énergie nécessaire pour produire de la chaleur.
  • Déshydratation : fréquente chez les personnes âgées, elle perturbe la régulation thermique du corps.
  • Sédentarité : le manque d’activité physique régulière réduit la capacité du corps à générer et maintenir sa chaleur.

Ces facteurs sont particulièrement préoccupants car ils créent un cercle vicieux : avoir froid pousse à bouger moins, ce qui aggrave la sensation de froid.

Les médicaments qui refroidissent

De nombreux médicaments couramment prescrits aux personnes âgées peuvent affecter la thermorégulation corporelle :

  • Les bêta-bloquants utilisés pour traiter l’hypertension peuvent réduire la circulation périphérique.
  • Les vasodilatateurs peuvent augmenter la perte de chaleur par la peau.
  • Certains psychotropes et antidépresseurs interfèrent avec les mécanismes de thermorégulation.
  • Les diurétiques peuvent provoquer une déshydratation qui perturbe la régulation thermique.

Il est important que les seniors et leurs soignants soient conscients de ces effets secondaires potentiels et en discutent avec leur médecin si la sensation de froid devient problématique.

L’environnement domestique

Les conditions de vie jouent un rôle majeur dans le confort thermique des personnes âgées :

  • De nombreux seniors vivent dans des logements anciens mal isolés.
  • Certains réduisent leur chauffage par souci d’économie, surtout face à l’augmentation des coûts énergétiques.
  • L’humidité excessive dans le logement accentue la sensation de froid.

Ces problèmes sont d’autant plus préoccupants que les personnes âgées passent généralement plus de temps à domicile que les populations plus jeunes.

LIRE AUSSI : Que faire si un senior refuse de chauffer sa maison ?

Les dangers réels du froid pour les seniors

La sensation de froid n’est pas qu’une simple question de confort – elle peut avoir des conséquences graves sur la santé des personnes âgées.

Le risque d’hypothermie souvent sous-estimé

L’hypothermie – une température corporelle inférieure à 35°C – représente un danger réel pour les seniors. Ce qui est particulièrement insidieux, c’est qu’elle peut survenir même à des températures ambiantes considérées comme modérées (entre 15°C et 20°C).

Les personnes âgées peuvent développer une hypothermie légère sans même s’en rendre compte, car les symptômes initiaux comme la confusion et la somnolence peuvent être confondus avec d’autres problèmes courants chez les seniors.

Impact sur le système cardiovasculaire

Le froid exerce une pression considérable sur le cœur et les vaisseaux sanguins :

  • Il provoque une vasoconstriction qui augmente la pression artérielle.
  • Il accroît la viscosité du sang, augmentant le risque de caillots.
  • Il peut déclencher des arythmies cardiaques.

Ces effets expliquent pourquoi les hospitalisations pour infarctus et AVC[1] augmentent significativement pendant les périodes froides, particulièrement chez les personnes âgées déjà fragilisées.

Défenses immunitaires affaiblies

Le froid chronique peut compromettre le système immunitaire des personnes âgées, les rendant plus vulnérables aux infections :

  • Les infections respiratoires comme la grippe et la pneumonie deviennent plus fréquentes
  • La circulation réduite dans les muqueuses nasales diminue leur capacité à filtrer les agents pathogènes
  • La réponse immunitaire globale est ralentie par le stress physiologique du froid

Cette vulnérabilité accrue explique en partie pourquoi les taux de mortalité des personnes âgées augmentent pendant les mois d’hiver.

Risques liés à la mobilité et aux extrémités

Le froid entraîne des risques physiques directs :

  • La raideur articulaire aggravée par le froid augmente le risque de chutes
  • Les extrémités froides (mains, pieds) perdent en sensibilité et en dextérité
  • Dans les cas extrêmes, les engelures peuvent survenir, particulièrement chez les personnes souffrant de problèmes circulatoires
raideur des doigts du senior à cause du froid

Ces problèmes peuvent considérablement limiter l’autonomie des personnes âgées et leur qualité de vie quotidienne.

Solutions pratiques pour combattre efficacement le froid

Face à ces défis, il existe heureusement de nombreuses stratégies efficaces pour aider les personnes âgées à mieux supporter le froid.

Adapter son alimentation pour générer plus de chaleur

Une nutrition adaptée peut faire une grande différence dans la capacité du corps à produire et maintenir sa chaleur :

  • Privilégier les repas chauds et nutritifs riches en protéines et en bons lipides.
  • Consommer régulièrement des boissons chaudes tout au long de la journée.
  • Veiller à un apport suffisant en calories pour soutenir le métabolisme.
  • Assurer un bon niveau d’hydratation, même en l’absence de sensation de soif.

Certains aliments comme le gingembre, la cannelle et les piments contiennent des composés qui peuvent stimuler temporairement la circulation et la sensation de chaleur.

Créer un environnement domestique chaleureux

Optimiser son logement peut considérablement améliorer le confort thermique :

  • Maintenir une température ambiante d’au moins 19°C dans les pièces de vie et 17°C dans les chambres
  • Installer des rideaux épais aux fenêtres pour limiter les déperditions de chaleur
  • Utiliser des tapis sur les sols froids pour isoler du froid et réduire les sensations de froid aux pieds
  • Placer des boudins de porte pour éviter les courants d’air
  • S’informer sur les aides financières disponibles pour l’amélioration de l’isolation du logement

Un simple thermomètre d’intérieur peut aider à vérifier que la température reste dans une zone confortable et sécuritaire.

S’habiller intelligemment contre le froid

La façon de s’habiller peut faire une énorme[2] différence dans la sensation de confort thermique :

  • Privilégier la technique des multicouches qui emprisonne l’air chaud près du corps
  • Porter des vêtements en fibres naturelles comme la laine ou le coton
  • Ne pas négliger la protection des extrémités : chaussettes chaudes, gants et bonnet même à l’intérieur si nécessaire
  • Utiliser des chaufferettes réutilisables pour les mains et les pieds lors des sorties

Même à l’intérieur, le port de vêtements adaptés peut réduire considérablement la sensation de froid tout en permettant de maintenir une température ambiante raisonnable.

Bouger régulièrement pour stimuler la chaleur corporelle

L’activité physique est l’un des moyens les plus efficaces pour combattre le froid :

  • Pratiquer des exercices doux mais réguliers adaptés à sa condition physique
  • Intégrer de petits mouvements dans sa routine quotidienne, même assis
  • Privilégier les activités qui font travailler les grands groupes musculaires
  • Participer à des cours collectifs pour seniors qui combinent activité physique et socialisation

Même de simples exercices comme marcher dans son appartement, faire des mouvements de bras ou des flexions légères peuvent augmenter significativement la température corporelle.

Mettre en place un système de vigilance et de soutien

La sécurité des personnes âgées face au froid passe aussi par un bon réseau de soutien :

  • Organiser des visites régulières de la famille, des amis ou des voisins
  • Envisager un système de téléassistance pour les personnes vivant seules
  • S’inscrire sur les registres communaux des personnes vulnérables pour bénéficier d’une surveillance accrue en période de grand froid
  • Prévoir un plan d’urgence en cas de panne de chauffage ou de conditions météorologiques extrêmes

Ces mesures de précaution peuvent littéralement sauver des vies lors des vagues de froid.

La sensibilité accrue au froid chez les personnes âgées n’est pas une fatalité contre laquelle on ne peut rien faire. En comprenant les mécanismes physiologiques en jeu et en adoptant des stratégies préventives adaptées, il est tout à fait possible d’améliorer significativement le confort et la sécurité des seniors face aux basses températures. La clé réside dans une approche globale qui combine adaptations de l’environnement, habitudes quotidiennes et vigilance accrue. N’oublions pas que derrière ce qui peut sembler être une simple question de confort se cache un véritable enjeu de santé publique qui mérite toute notre attention.

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Commentaires (2)

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  1. Claudine Turet

    Faire ses courses, entretenir sa maison, se faire à manger s’occuper de ses papiers etc, peuvent ils être considérés comme exercices physiques pour une personne de 85 ans?

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      Oui, ces activités du quotidien peuvent être considérées comme des exercices physiques légers et bénéfiques pour une personne de 85 ans.
      Bonne journée.
      Amandine

      Répondre

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