Maladie de Crohn & affections longue durée : les droits et conseils pour mieux vivre au quotidien

La maladie de Crohn chez les seniors : l’essentiel à savoir

La maladie de Crohn est une affection inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) qui évolue par poussées. Elle touche en France plus de 100 000 personnes et peut aussi apparaître après 60 ans. 

Chez les seniors, le diagnostic est parfois plus difficile car les symptômes sont moins typiques. Le risque de complications (fistules, sténoses, abcès) et de dénutrition^[1] est plus élevé, ce qui rend la prise en charge spécifique. Ces particularités expliquent l’importance d’une reconnaissance en ALD et de dispositifs d’aide adaptés.

La reconnaissance en ALD : une étape cruciale pour les seniors atteints de la maladie de Crohn

La maladie de Crohn figure sur la liste des 30 affections longue durée (ALD 30) prises en charge à 100% par l’Assurance Maladie. Cette reconnaissance est particulièrement importante pour les seniors, souvent confrontés à une baisse de revenus liée à la retraite.

Comment obtenir la reconnaissance en ALD ?

La demande d’ALD est initiée par le médecin traitant qui remplit un formulaire spécifique (protocole de soins) précisant :

• Les éléments cliniques justifiant la demande
• Les traitements nécessaires
• Les spécialistes à consulter
• La durée prévisible des soins

Ce document est ensuite transmis au médecin-conseil de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM^[2]) qui valide la demande. Une fois accepté, le protocole de soins est signé par le patient, le médecin traitant et le médecin-conseil.

Pour les seniors déjà diagnostiqués depuis plusieurs années, un renouvellement de la demande d’ALD est nécessaire tous les 5 ans.

Ce que couvre l’ALD pour la maladie de Crohn

La reconnaissance en ALD permet une prise en charge à 100% des frais de santé liés à la maladie, sur la base du tarif de la Sécurité sociale, notamment :

• Les consultations médicales (généraliste et spécialistes)
• Les examens de biologie et d’imagerie (prises de sang, scanner, IRM, coloscopie)
• Les médicaments prescrits pour traiter la maladie
• Les hospitalisations en lien avec la pathologie
• Certains dispositifs médicaux spécifiques (poches de stomie par exemple)

Attention : certains frais restent à la charge du patient ou de sa mutuelle comme les dépassements d’honoraires, le forfait hospitalier ou les médicaments à service médical rendu insuffisant.

Droits sociaux et aides spécifiques pour les seniors atteints de la maladie de Crohn

Au-delà de la prise en charge des soins, diverses aides peuvent être mobilisées pour améliorer le quotidien des seniors souffrant de cette pathologie chronique.

L’Allocation Adulte Handicapé (AAH)

Pour les personnes dont la maladie de Crohn entraîne un taux d’incapacité significatif (au moins 50%), l’AAH peut constituer un complément de ressources appréciable. Cette allocation est attribuée par la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) après évaluation du dossier.

Pour les seniors, elle peut être cumulée avec une pension de retraite, sous certaines conditions de ressources. Le montant maximal de l’AAH est de 1 033.32 euros par mois en 2025.

La Prestation de Compensation du Handicap (PCH)

Cette aide permet de financer des dépenses liées au handicap généré par la maladie :

• Aides humaines (auxiliaire de vie^[3])
• Aménagements du logement (salle de bain adaptée, WC surélevés)
• Aides techniques spécifiques
• Frais de transport

Pour les personnes âgées de plus de 60 ans, la PCH n’est accessible que si le handicap était déjà présent avant cet âge ou si la personne est encore en activité professionnelle.

L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA)

Pour les seniors de plus de 60 ans en perte d’autonomie en raison de la maladie de Crohn, l’APA constitue une aide précieuse. Attribuée par le Conseil départemental, elle finance diverses aides :

• Services d’aide à domicile^[4]
• Portage de repas
• Téléassistance
• Adaptation du logement

Son montant varie selon le degré de dépendance^[5] (évalué selon la grille AGGIR^[7][6]) et les ressources du bénéficiaire.

La carte mobilité inclusion (CMI)

La CMI, qui remplace les anciennes cartes d’invalidité, offre plusieurs avantages aux personnes dont la maladie de Crohn limite la mobilité ou génère une fatigabilité importante :

• Priorité dans les files d’attente
• Places de stationnement réservées
• Avantages fiscaux selon le taux d’incapacité
• Réductions tarifaires dans certains établissements

La demande s’effectue auprès de la MDPH et nécessite une évaluation médicale.

Conseils pratiques pour mieux vivre avec la maladie de Crohn au quotidien

Au-delà des aspects administratifs et financiers, plusieurs stratégies peuvent aider les seniors à mieux gérer leur quotidien avec cette pathologie chronique.

Adapter son alimentation

Si aucun régime miracle n’existe pour la maladie de Crohn, certains ajustements alimentaires peuvent limiter les symptômes :

• Privilégier les repas légers et fréquents plutôt que trois repas copieux
• Cuire suffisamment les aliments pour faciliter leur digestion
• Éviter les aliments identifiés comme déclencheurs de symptômes (approche personnalisée)
• Maintenir une bonne hydratation
• Compléter l’alimentation par des compléments nutritionnels si nécessaire

Un suivi par un diététicien spécialisé est fortement recommandé, particulièrement pour les seniors qui présentent un risque accru de dénutrition.

Adapter son logement

Quelques aménagements peuvent considérablement améliorer le confort :

• Installation de toilettes surélevées, plus confortables en cas de douleurs articulaires associées
• Multiplication des points d’eau dans le logement
• Aménagement d’un espace de repos à proximité des toilettes pour les périodes de fatigue intense
• Installation d’une douche à l’italienne pour faciliter l’hygiène

Gérer les déplacements

La crainte des accidents digestifs limite souvent les sorties des personnes atteintes de la maladie de Crohn. Quelques astuces peuvent aider :

• Utiliser des applications mobiles qui localisent les toilettes publiques
• Se munir d’une carte « urgence toilettes » disponible auprès des associations de patients
• Préparer un kit d’urgence (lingettes, sous-vêtements de rechange, protections)
• Privilégier les sorties à des moments où les symptômes sont habituellement moins présents

Maintenir une activité physique adaptée

Contrairement aux idées reçues, l’activité physique est bénéfique pour les personnes atteintes de la maladie de Crohn, y compris les seniors :

• Elle réduit le stress, facteur déclenchant des poussées
• Elle maintient la masse musculaire, souvent affectée par la maladie et les traitements
• Elle améliore le transit intestinal
• Elle renforce le système immunitaire

Des activités douces comme la marche, la natation ou le yoga sont particulièrement recommandées. L’intensité doit être adaptée à l’état de santé et à la forme du moment.

Le rôle essentiel du soutien psychologique et social

La maladie de Crohn peut générer un isolement social chez les seniors, qui s’ajoute parfois à la solitude liée à l’âge.

L’importance du soutien psychologique

La maladie de Crohn peut provoquer :

• Anxiété liée à l’imprévisibilité des symptômes
• Dépression^[8] face à la chronicité de la pathologie
• Sentiment de perte de contrôle
• Altération de l’image corporelle (surtout en cas de stomie)

Un suivi psychologique peut être pris en charge dans le cadre de l’ALD. Certains centres hospitaliers proposent des consultations avec des psychologues spécialisés dans les maladies chroniques.

Les associations de patients : un soutien précieux

L’Association François Aupetit (AFA Crohn RCH) propose de nombreux services aux patients, y compris les seniors :

• Permanence téléphonique d’information
• Documentation adaptée
• Groupes de parole
• Forums d’échanges
• Ateliers d’éducation thérapeutique

Ces espaces d’échange permettent de partager des astuces pratiques et de rompre l’isolement souvent ressenti par les seniors malades.

Le recours aux services d’aide à domicile

Pour les périodes de poussées intenses, le recours à des services d’aide à domicile peut soulager considérablement :

• Aide aux courses et à la préparation des repas
• Assistance pour l’entretien du logement
• Aide à la toilette si nécessaire
• Accompagnement aux rendez-vous médicaux

Ces services peuvent être financés par l’APA ou la PCH selon la situation du senior, par la sécurité sociale et/ou la mutuelle.

Coordonner les soins : un enjeu majeur pour les seniors atteints de la maladie de Crohn

La multiplicité des intervenants médicaux nécessite une coordination efficace, particulièrement chez les seniors qui consultent souvent plusieurs spécialistes.

Le Dossier Médical Partagé (DMP)

Ce dossier numérique sécurisé permet de centraliser les informations médicales et de faciliter leur partage entre professionnels de santé. Pour les seniors atteints de la maladie de Crohn, il présente plusieurs avantages :

• Évite les examens redondants
• Facilite la détection des interactions médicamenteuses
• Assure un meilleur suivi en cas d’urgence
• Simplifie la transmission d’informations entre spécialistes

Le DMP peut être créé en ligne sur le site dédié ou directement auprès de la pharmacie habituelle.

Le rôle central du médecin traitant

Pour les seniors atteints de la maladie de Crohn, le médecin traitant joue un rôle pivot :

• Il coordonne les différents intervenants médicaux
• Il assure le renouvellement du protocole ALD
• Il adapte les traitements en tenant compte des autres pathologies
• Il oriente vers les spécialistes et services appropriés

Des consultations régulières, même en période de rémission, permettent un suivi optimal.

Les réseaux de santé spécialisés

Certains territoires disposent de réseaux de santé dédiés aux maladies chroniques ou au maintien à domicile^[9] des personnes âgées. Ces réseaux coordonnent l’ensemble des interventions autour du patient et facilitent le parcours de soins.

Renseignez-vous auprès de votre CPAM ou du service social de l’hôpital pour connaître les réseaux disponibles dans votre secteur.

La maladie de Crohn représente un défi quotidien pour les seniors qui en sont atteints. Néanmoins, grâce à la reconnaissance en ALD et aux nombreux dispositifs d’aide existants, il est possible d’améliorer significativement la qualité de vie. L’information sur les droits et l’accès aux aides constitue une première étape essentielle pour alléger le fardeau de cette maladie chronique et permettre aux personnes âgées de maintenir une vie sociale épanouissante malgré les contraintes imposées par la pathologie.