Demandée depuis deux ans par les 640 000 infirmier(e)s de France, la réforme du métier d’infirmier a enfin reçu l’approbation des députés de l’Assemblée nationale. Examinée en première lecture dans la nuit du 10 au 11 mars 2025, cette proposition de loi reconnaît les missions essentielles de ces soignants et l’évolution de leur métier face aux nouvelles réalités du secteur. Entre la révision des missions socle et l’autorisation de diagnostics et de prescription, comment le gouvernement compte moderniser la profession infirmière en 2025 ?

Le métier d’infirmier : un enjeu dans le secteur de la santé

Ces dernières années, la désertification médicale contraint les infirmier(e)s à élargir leurs champs d’action.

La mutation du système de santé 

En raison de la pénurie de professionnels de santé dans certaines régions et des difficultés d’accès aux soins (avec des délais d’attente prolongés pour certaines consultations), les infirmier(e)s se voient déléguer de plus en plus de tâches médicales pour répondre aux besoins de la population : vaccination, réalisation de certificats de décès, suivi de malades chroniques pour les infirmières expérimentées… 

projet de loi pour les infirmiers

Une réforme attendue

Défendue par 86 % des Français (selon l’enquête de l’institut ELABE en septembre 2024), l’évolution de la première profession paramédicale en France, à travers leurs missions et leurs compétences dans la prise en charge des patients, est désormais reconnue grâce à une proposition de loi portée par Nicole Dubré-Chirat (Ensemble pour la République) pour réformer le métier d’infirmier, validée à l’unanimité par l’Assemblée nationale (142 voix pour, 0 contre).

Réforme du métier d’infirmier : quoi de neuf ?

La proposition de loi sur la refonte du métier d’infirmier s’articule autour de trois axes principaux, répartis sur deux articles.

Les missions socles 

L’article 1er de la proposition de loi redéfinit la profession d’infirmier, encadrée depuis 2004, autour de cinq « missions socles » :

  • la réalisation de soins infirmiers : curatifs, palliatifs, relationnels et médicamenteux destinés à la surveillance clinique,
  • le suivi du parcours de santé des patients et leur orientation,
  • la prévention, incluant dépistage et éducation thérapeutique,
  • la participation à la formation des pairs,
  • la recherche.

La consultation et le diagnostic infirmier

Deux nouvelles notions sont ajoutées aux missions : la consultation infirmière et le diagnostic infirmier, qui autorisent les infirmiers à examiner les patients et à leur prescrire certains produits (définis par arrêté).

En commission, l’infirmier devra alors adresser régulièrement un compte rendu au médecin traitant du patient. Il s’agit d’une expérimentation d’une durée de trois ans qui se déroulera dans seulement cinq départements dont la liste sera précisée par décret.

La pratique avancée des spécialités

L’article 2, dédié aux infirmiers en pratique avancée (IPA) comme les infirmiers anesthésistes, de bloc opératoire et de puériculteurs, propose trois nouveaux lieux d’exercice au sein de :

  • La protection maternelle et infantile (PMI),
  • La santé scolaire,
  • L’aide sociale[1] à l’enfance. 

Cette approche est l’occasion pour ces soignants spécialisés de progresser dans leur carrière sans que cela n’affecte leurs conditions de diplôme.

Pour prendre en compte les particularités de chaque spécialité, un décret précisera la durée minimale d’exercice nécessaire pour chacune d’elles ainsi que les modalités d’accès à la formation. 

Refonte des programmes de formation infirmière

Pour permettre aux infirmiers étudiants de répondre à ces nouvelles missions plus complexes et de faire face aux demandes croissantes en matière de soins, l’Ordre national des infirmiers (ONI) travaille sur une mise à jour des programmes de formations. Prévue pour septembre 2025, cette dernière comprend : 

  • De nouvelles compétences attribuées avec l’exception d’exercice illégal de la médecine. 
  • L’utilisation de technologies digitales pour améliorer leur préparation sur les aspects de la santé numérique (dossiers médicaux électroniques (DME) et santé mobile) et apprendre sur des plateformes en ligne ou sur des campus virtuels.
  • Une spécialisation précoce des nouveaux cursus qui encouragent les étudiants à acquérir des compétences avancées et plus gratifiantes dans des secteurs ciblés comme la pédiatrie, la gériatrie[2], ou l’oncologie. 

Vers de meilleures conditions de travail ?

infirmières en discussion

Afin que cette hausse de travail, tant en quantité qu’en technicité, reste séduisante, la profession attend une révision de l’attractivité des conditions de travail.
Plusieurs pistes, mentionnées par la plateforme des renforts soignants Medelse, avaient été abordées en début d’année :

  • Une revalorisation du travail de nuit, les dimanches et jours fériés de 25 % par rapport aux taux en journée – y compris le personnel soignant non médical, au sein de la Fonction publique hospitalière.
  • Renforcer le bien-être des infirmiers : pour préserver le métier et lutter contre le burn-out, fléau répandu dans le domaine des soins infirmiers.
    – des systèmes de soutien pour diminuer le stress et la pénibilité au travail,
    – des programmes dédiés à la santé mentale et au soutien psychologique.
  • Des primes comme :
    La prime Ségur de la santé qui propose une augmentation salariale nette de 183 € par mois pour leur dévouement.
    Des primes spécifiques pour accompagner divers moments de leur parcours professionnel telles que : la prime de début de carrière, la prime de contagion et la prime d’exercice en soins critiques.

Si, pour l’instant, le texte de loi actuel ne mentionne pas de mesures relatives aux rémunérations ou à la prise en compte des retraites, ces questions seront étudiées à la suite d’un amendement proposé par La France Insoumise, adopté à 149 voix.

La proposition de loi sur la profession d’infirmier marque une première étape dans l’évolution de la profession et l’amélioration de la prise en charge des patients. Si elle ne suffira pas à pallier le manque de médecins, la reconnaissance des rôles spécifiques des infirmiers incite les professionnels de santé à collaborer a minima sur l’orientation des patients et les soins relationnels. Mais pour cela, la proposition doit désormais poursuivre son parcours législatif au Sénat, avec une entrée en vigueur des textes réglementaires espérée d’ici le 31 janvier 2026. 

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