Dans la lumière froide des laboratoires, les avancées médicales se jouent souvent loin des projecteurs. Pourtant, à Lyon, un projet attire en ce moment l’attention bien au-delà du cercle restreint des spécialistes de la sclérose latérale amyotrophique (SLA), plus connue sous le nom de maladie de Charcot. Une maladie cruelle, dévastatrice, qui frappe sans distinction d’âge, condamnant chaque année en France près de 1 500 à 2 000 personnes à une paralysie progressive et irréversible. Jusqu’à présent, aucune piste thérapeutique n’avait permis d’enrayer la progression de cette affection mortelle. Aujourd’hui, un acteur lyonnais, Axoltis Pharma, change la donne.

La SLA, une fatalité qui asphyxie les espoirs

La SLA n’épargne presque personne. Les neurones moteurs, ceux qui commandent les mouvements, s’éteignent, inexorablement. Les muscles s’affaiblissent, la parole devient difficile, la déglutition aussi, puis la respiration. 

L’espérance de vie oscille entre trois et cinq ans après le diagnostic. On estime à 8 000 le nombre de patients en France, tous profils confondus. Cinq décès chaque jour, des familles désarmées, et une recherche longtemps restée impuissante. 

Les traitements actuels se bornent à freiner marginalement la progression ou à soulager les symptômes. Aucun médicament ne permet de stopper la maladie, encore moins de la guérir.

seniors atteints de la maladie de charcot

LIRE AUSSI : Fin de vie maladie de Charcot : comment s’y préparer ? 

Un projet régional ambitieux pour accélérer la recherche

Face à l’urgence de trouver des traitements pour la SLA, le projet AURALS réunit plusieurs acteurs à Lyon : les Hospices Civils de Lyon, la biotech Axoltis Pharma, le laboratoire Active Biomarkers (KCAS BIO) et le soutien des collectivités locales. L’État et la région Auvergne-Rhône-Alpes financent également le projet via le plan France 2030, avec Bpifrance comme opérateur.

Ce projet s’articule autour de deux axes : 

  • tester le médicament NX210c sur des patients atteints de SLA,
  • développer de nouveaux outils de suivi, comme des biomarqueurs sanguins, pour mieux mesurer la progression de la maladie et la réponse aux traitements.

Deux années décisives pour valider ces approches et, peut-être, ouvrir enfin la voie à une alternative thérapeutique sérieuse.

NX210c, une molécule conçue pour restaurer la barrière hématoencéphalique

Le cœur de cette recherche, c’est une petite molécule appelée NX210c. Il s’agit d’un peptide, c’est-à-dire une petite protéine, inspiré d’une substance naturelle produite dans le cerveau des bébés pour aider à construire leur système nerveux. Chez l’adulte, cette substance n’est plus fabriquée, ce qui rend la réparation des neurones très difficile lorsqu’ils sont endommagés.

NX210c agit sur un point clé de la maladie : la barrière qui protège le cerveau. Normalement, cette barrière empêche les substances dangereuses du sang de pénétrer dans le cerveau. Dans la SLA, elle se fragilise, laissant passer des toxines et des molécules qui accélèrent la destruction des neurones. NX210c aide à réparer cette barrière, ralentissant ainsi les dégâts et l’inflammation.

Cette technologie est unique : Axoltis Pharma détient plusieurs brevets et la molécule a obtenu le statut de médicament orphelin aux États-Unis, ce qui reconnaît son potentiel pour traiter une maladie rare qui n’a actuellement pas de solution.

Essai clinique : une méthodologie rapide, une attente forte

L’essai clinique, coordonné par le Dr Emilien Bernard aux Hospices Civils de Lyon, cible 80 patients répartis dans 15 centres français. Chaque volontaire reçoit, sur quatre semaines, trois injections hebdomadaires de dix minutes. Deux tiers reçoivent NX210c (à différentes doses), le dernier tiers un placebo. Ce protocole court tranche avec d’autres essais, souvent étalés sur un ou deux ans. L’objectif : aller vite, sans négliger la sécurité.

Un premier patient, Bernard, 78 ans, a inauguré ce protocole à l’hôpital neurologique Pierre Wertheimer de Bron. À terme, une vingtaine de patients lyonnais seront intégrés, puis l’étude s’étendra à l’ensemble du territoire. La tolérance du produit avait déjà été validée lors d’une phase Ib sur des volontaires sains : aucun effet indésirable majeur n’a été observé, un facteur capital pour des patients fragilisés.

analyse dans un laboratoire lyonnais sur une molécule prometteuse contre la maladie de Charcot

Biomarqueurs, personnalisation et impact sur la prise en charge

Le projet ne se limite pas à NX210c : il vise aussi à mieux comprendre la SLA grâce à des analyses sanguines spécifiques, appelées biomarqueurs. Ces analyses permettent de suivre l’évolution de la maladie et d’ajuster le traitement selon chaque patient.

Concrètement, elles peuvent aider à :

  • identifier les patients qui répondent le mieux au traitement,
  • détecter rapidement une aggravation de la maladie,
  • mesurer l’efficacité d’un traitement au fil du temps.

L’objectif est de personnaliser la médecine, pour agir plus vite et plus efficacement dans une maladie où chaque jour compte.

Financements, enjeux économiques et retombées régionales

L’innovation a un prix. Pour mener l’essai à son terme, Axoltis Pharma doit réunir près de 10 millions d’euros. Le plan France 2030, la région, les associations de patients telles que l’ARSLA, mais aussi les investissements privés, structurent un écosystème où la recherche fondamentale rencontre le pragmatisme économique.

Ces programmes régionaux visent aussi à renforcer la compétitivité, à créer des emplois autour de la filière biotech, à ancrer dans le territoire une expertise qui pourra rayonner à l’échelle européenne.

Des résultats attendus pour 2026, mais déjà une dynamique enclenchée

Les premiers résultats cliniques de NX210c sont attendus au printemps 2026. En attendant, patients, familles et soignants suivent le projet de près. Si la molécule fonctionne, ce sera non seulement un progrès médical, mais aussi le fruit d’une mobilisation régionale et collective.

En parallèle, d’autres pistes sont étudiées, comme un traitement à base d’interleukine-2 à faible dose, qui a montré un certain potentiel chez certains patients grâce aux biomarqueurs. La recherche avance donc pas à pas, mais avec de réels espoirs pour l’avenir.

FAQ pratique sur la molécule NX210c et l’essai lyonnais

Comment fonctionne NX210c ? 

Il s’agit d’un peptide qui vise à restaurer la barrière hématoencéphalique, limitant ainsi l’intrusion de substances toxiques dans le cerveau des patients atteints de SLA.

Qui peut participer à l’essai clinique ? 

Les patients diagnostiqués avec une SLA, suivis dans l’un des 15 centres français partenaires, peuvent être proposés à l’inclusion selon des critères médicaux stricts.

Quels sont les effets secondaires connus ? 

À ce stade, la tolérance est jugée très bonne, sans effets secondaires majeurs recensés lors des phases de test sur volontaires sains.

Quand les premiers résultats seront-ils connus ? 

Le second trimestre 2026 marquera la publication des premières analyses cliniques de cet essai de phase II.

La molécule sera-t-elle disponible pour tous ? 

Si l’essai confirme l’efficacité et l’innocuité, une mise sur le marché dépendra d’étapes réglementaires supplémentaires, généralement quelques années après la phase II.

La maladie de Charcot reste, en 2025, un adversaire redoutable. Les avancées lyonnaises marquent un tournant, insufflant un espoir là où l’attente devenait résignation. NX210c, ses biomarqueurs associés, et la mobilisation scientifique qui l’entoure, dessinent les contours d’une médecine plus précise, plus humaine. Les regards se tournent vers Lyon, laboratoire d’un futur qui, peut-être, ne sera plus synonyme d’impuissance.

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Commentaires (8)

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  1. Valentini carmela

    Bonjour

    Dans un de vos messages vous parlez du centre participant.
    Mon frère est atteint de la SLA.
    Cet article apporte effectivement de l’espoir.
    Pourriez vous me transmettre une adresse mail afin de faire une demande pour un essai clinique pour mon frère.
    Ça donne effectivement beaucoup d’espoir car c’est une maladie qui jusqu’à ce jour n’en avait pas.

    Cordialement
    Carmela

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      C’est une étape pleine d’espoir ! Le mieux serait vraiment de prendre contact avec le neurologue de votre frère pour évoquer spécifiquement cet essai ; il est le seul à pouvoir examiner sa situation de près et voir s’il y a une possibilité concrète de participation à ce test.
      Bonne journée.
      Amandine

      Répondre
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