Au carrefour des troubles neurologiques, deux terminologies se distinguent avec force, captivant à la fois l’intérêt des spécialistes et du grand public : la démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer. À première vue, elles semblent marcher main dans la main, présentant des symptômes similaires et touchant de manière croissante notre population vieillissante. 

Mais, pourquoi est-il si crucial de distinguer l’une de l’autre ? La réponse réside non seulement dans leurs mécanismes sous-jacents, mais aussi dans les implications pour le diagnostic, le traitement et la prévention. Ne pas les différencier reviendrait à confondre pommes et oranges dans le monde médical. 

Dans cette exploration, nous allons vous fournir des clés essentielles pour comprendre les nuances qui définissent ces deux affections et pourquoi elles méritent une attention distincte.

Des mécanismes physiopathologiques distincts

La démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer sont toutes deux des affections neurodégénératives, mais leurs mécanismes physiopathologiques sous-jacents sont fondamentalement différents.

Dans le cas de la démence vasculaire, la cause principale est une altération de la circulation sanguine dans le cerveau, qui entraîne une diminution de l’apport en oxygène et en nutriments aux cellules nerveuses. Cette atteinte vasculaire peut être due à diverses causes, notamment :

  • Des infarctus cérébraux, qui provoquent la mort de zones du cerveau en raison d’une obstruction des vaisseaux sanguins;
  • Des hémorragies cérébrales, qui entraînent des saignements dans le tissu cérébral et une compression des cellules nerveuses;
  • Une maladie des petits vaisseaux, qui affecte les artérioles et les capillaires du cerveau et provoque une altération progressive de la circulation;
  • Une angiopathie amyloïde, qui se caractérise par le dépôt de protéines amyloïdes dans les parois des vaisseaux cérébraux et une fragilisation de ces derniers.

La maladie d’Alzheimer, quant à elle, est principalement caractérisée par l’accumulation anormale de deux protéines dans le cerveau : l’amyloïde bêta et la protéine tau. Ces accumulations forment des plaques amyloïdes et des enchevêtrements neurofibrillaires, respectivement, qui perturbent la communication entre les neurones et provoquent la mort cellulaire.

Les mécanismes précis qui conduisent à ces accumulations protéiques et aux lésions cérébrales associées restent en partie inconnus, mais plusieurs hypothèses sont actuellement à l’étude, notamment des déséquilibres dans la production et l’élimination des protéines, des défauts dans leur repliement ou des processus inflammatoires et immunitaires.

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Des symptômes cliniques parfois similaires, parfois divergents

Les manifestations cliniques de la démence vasculaire et de la maladie d’Alzheimer peuvent se chevaucher, mais certaines caractéristiques permettent de les distinguer.

Différencier les symptômes de la démence vasculaire et de la maladie d’Alzheimer

Les symptômes communs aux deux affections comprennent :

  • Des troubles de la mémoire, en particulier pour les informations récentes et les événements du quotidien;
  • Des difficultés dans les fonctions exécutives, c’est-à-dire dans la planification, l’organisation et la réalisation des tâches complexes;
  • Des altérations du langage, comme des difficultés à trouver les mots, à comprendre les phrases ou à construire un discours cohérent;
  • Des troubles de l’attention et de la concentration, qui peuvent affecter la capacité à suivre une conversation ou à effectuer des tâches nécessitant un effort mental soutenu;
  • Des modifications du comportement et de la personnalité, telles que l’apathie, l’irritabilité, l’agitation ou la dépression.
Exemple de situation ou les symptômes de la maladie d'Alzheimer peuvent aussi être attribués à la démence vasculaire

Manifestations cliniques : Points communs et distinctions entre la démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer

Certaines différences cliniques peuvent aider à différencier les deux pathologies:

  • La démence vasculaire se caractérise souvent par un début plus soudain et des fluctuations marquées des symptômes, tandis que la maladie d’Alzheimer évolue de manière plus insidieuse et progressive;
  • Les troubles de la marche, de l’équilibre et de la coordination sont plus fréquents et plus précoces dans la démence vasculaire que dans la maladie d’Alzheimer;
  • Les déficits cognitifs sont généralement plus focalisés et spécifiques dans la démence vasculaire, en fonction des zones du cerveau affectées par les lésions vasculaires, alors qu’ils sont plus diffus et généralisés dans la maladie d’Alzheimer;
  • La présence d’antécédents d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou de facteurs de risque cardiovasculaires, est plus évocatrice d’une démence vasculaire que d’une maladie d’Alzheimer.

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Des facteurs de risque contrastés et des stratégies de prévention distinctes

La démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer partagent certaines causes potentielles, mais présentent également des facteurs de risque spécifiques et des approches préventives distinctes.

Facteurs de risque communs : Démence vasculaire et maladie d’Alzheimer

Les facteurs de risque communs aux deux pathologies comprennent :

  1. L’âge, avec un risque accru de démence à partir de 65 ans et un doublement du risque tous les 5 ans au-delà de cet âge;
  1. Les antécédents familiaux de démence ou de maladies neurodégénératives;
  1. Les facteurs génétiques, tels que la présence de l’allèle epsilon 4 de l’apolipoprotéine E (APOE4), qui augmente le risque de maladie d’Alzheimer et pourrait également être associée à la démence vasculaire;
  1. Le sexe, avec une prévalence plus élevée de la maladie d’Alzheimer chez les femmes, en partie en raison de leur espérance de vie plus longue, et une répartition plus équilibrée de la démence vasculaire entre les sexes.

Distinguer les risques : Démence vasculaire VS Maladie d’Alzheimer

Les facteurs de risque spécifiques à la démence vasculaire incluent :

  • L’hypertension artérielle, qui représente le principal facteur de risque modifiable pour cette affection;
  • Le diabète, qui peut favoriser l’apparition de lésions vasculaires dans le cerveau;
  • Le tabagisme, qui augmente le risque d’AVC et de maladie des petits vaisseaux cérébraux;
  • Le cholestérol élevé, qui peut contribuer à l’athérosclérose et à la réduction du flux sanguin cérébral;
  • Les maladies cardiaques, telles que l’insuffisance cardiaque, la fibrillation atriale ou les maladies des valves cardiaques, peuvent entraîner des embolies cérébrales et des infarctus.

Les facteurs de risque spécifiques à la maladie d’Alzheimer, quant à eux, sont moins bien établis, mais pourraient inclure :

  • Le faible niveau d’éducation, qui pourrait limiter la réserve cognitive et la capacité à compenser les lésions cérébrales;
  • Les traumatismes crâniens, qui pourraient favoriser l’accumulation de protéines amyloïdes et tau;
  • Les facteurs environnementaux, tels que l’exposition à certaines substances neurotoxiques ou la qualité de l’alimentation;
  • Les facteurs psychosociaux, comme le stress chronique, l’isolement social ou la dépression, qui pourraient altérer la fonction cognitive et la résilience neuronale.

Stratégies préventives pour la démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer

En ce qui concerne la prévention de ces deux affections, plusieurs stratégies peuvent être envisagées :

  • La prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaires, par le contrôle de la tension artérielle, la gestion du diabète, le sevrage tabagique, la réduction du cholestérol et le traitement des maladies cardiaques, est essentielle pour prévenir la démence vasculaire et pourrait également avoir un impact bénéfique sur la maladie d’Alzheimer;
  • Le maintien d’une activité physique régulière, qui améliore la circulation cérébrale, renforce la réserve cognitive et réduit le risque de déclin cognitif lié à l’âge;
  • La stimulation cognitive, par la pratique d’activités intellectuelles, artistiques ou sociales, qui favorise la plasticité neuronale et la création de nouvelles connexions synaptiques;
  • La gestion du stress et des troubles de l’humeur, par des techniques de relaxation, de méditation ou de psychothérapie, qui peuvent aider à préserver la fonction cognitive et à prévenir la dépression;
  • L’adoption d’un régime alimentaire équilibré, riche en antioxydants, en acides gras oméga-3 et en micronutriments, qui peut contribuer à la santé vasculaire et neuronale;
  • La surveillance et la réduction des facteurs environnementaux et psychosociaux néfastes, par l’éducation, la promotion de la santé et la mise en place de politiques publiques adaptées.
Exemple de stimulation cognitive par des exercices de mémoire

Des approches thérapeutiques spécifiques et complémentaires

La prise en charge de la démence vasculaire et de la maladie d’Alzheimer repose sur des approches thérapeutiques distinctes, mais aussi sur des interventions non pharmacologiques communes visant à soutenir la fonction cognitive, l’autonomie et la qualité de vie des patients et de leurs aidants.

Stratégies thérapeutiques pour la démence vasculaire

En ce qui concerne la démence vasculaire, le traitement vise principalement à :

  • Prévenir les complications et les récidives vasculaires, par l’utilisation d’antihypertenseurs, d’antidiabétiques, d’anticoagulants ou d’antiagrégants plaquettaires;
  • Améliorer la circulation cérébrale, par des médicaments vasodilatateurs ou des agents neuroprotecteurs;
  • Optimiser la réadaptation et la récupération fonctionnelle, par des interventions de kinésithérapie, d’orthophonie ou d’ergothérapie.

Approches de traitement pour la maladie d’Alzheimer

En ce qui concerne la maladie d’Alzheimer, le traitement comprend :

  • L’utilisation d’inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, tels que la donépézil, la rivastigmine ou la galantamine, qui augmentent la disponibilité du neurotransmetteur acétylcholine et améliorent la communication neuronale;
  • L’administration de médicaments antiglutamatergiques, comme le mémantine, qui protègent les neurones contre la toxicité excessive du glutamate;
  • Le développement de nouvelles approches thérapeutiques ciblant les mécanismes spécifiques de la maladie, tels que les immunothérapies anti-amyloïdes ou les modulateurs de la protéine tau, dont l’efficacité et la sécurité sont encore à l’étude dans des essais cliniques.

Interventions non pharmacologiques pour la démence et la maladie d’Alzheimer

Enfin, les interventions non pharmacologiques qui peuvent être bénéfiques pour les patients atteints de démence vasculaire et de maladie d’Alzheimer incluent :

  • La stimulation cognitive, par des programmes de remédiation, de réhabilitation ou d’entraînement cognitif, qui visent à renforcer les capacités résiduelles et à développer des stratégies de compensation;
  • La prise en charge des troubles du comportement et de l’humeur, par des thérapies comportementales, des interventions psychosociales ou des traitements antidépresseurs;
  • Le soutien aux aidants, par des groupes de parole, des formations, des dispositifs de répit ou des services de coordination des soins, qui permettent de réduire la charge de travail et le stress associé à la prise en charge de la démence;
  • Les adaptations environnementales, qui visent à simplifier, sécuriser et stimuler l’espace de vie des patients, afin de faciliter leur orientation, leur autonomie et leurs interactions sociales;
  • La promotion de l’activité physique, de l’alimentation équilibrée et de la qualité de vie, qui contribuent à maintenir la santé globale, la fonction cognitive et le bien-être psychologique des patients et de leurs aidants.

La démence vasculaire et la maladie d’Alzheimer ont des ressemblances frappantes, mais leurs différences sont cruciales pour la prévention, le diagnostic et le traitement. Comprendre ces nuances n’est pas qu’une simple formalité : c’est une étape essentielle pour assurer des soins adaptés et efficaces. À l’intersection de la recherche et de la pratique médicale, chaque avancée nous offre une lueur d’espoir. Dans ce combat pour la santé cérébrale, chaque détail, chaque distinction, compte.

Sophie, Conseillère Spécialisée Grand Âge

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Commentaires (2)

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  1. Nadine Lecocq

    Mon époux atteint de la maladie d’Alzheimer a été diagnostiqué par une IRM disant l hypocampe est touché il a82 ans et il est en phase 4 qu est ce que cela dit

    Répondre
    1. Amandine

      Bonjour

      Je vous remercie pour votre commentaire.
      Dans cette situation, il serait recommandé de consulter un neurologue spécialisé dans les maladies neurodégénératives, notamment la maladie d’Alzheimer.
      Bonne journée.
      Laetitia

      Répondre

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