Entrer dans une pièce et oublier ce que nous y cherchions, ou encore avoir le nom d’une personne sur le bout de langue… Sont autant de trous de mémoire frustrants, inquiétants et parfois, anodins. Si les pertes de mémoire sont courantes et arrivent à tout moment, elles suscitent une peur plus profonde chez les personnes âgées et leurs proches : celle d’une maladie neurodégénérative comme la maladie d’Alzheimer

Alors, comment distinguer un simple oubli d’une perte de mémoire pathologique ? Comment fonctionne notre mémoire et la maintenir en bonne santé ? Cap Retraite fait le point sur quand faut-il s’inquiéter de ce type d’amnésie. 

Pertes de mémoire  : à quel âge doit-on s’inquiéter ? 

Les trous de mémoire arrivent à tout âge et à tout moment. Néanmoins, les pertes de mémoire pathologiques sont plus fréquentes après 50 ans.

En effet, la mémoire est tout un ensemble de systèmes interconnectés qui traitent l’information en trois étapes : l’encodage, le stockage puis le rappel. 

Loin d’être parfaite, elle peut défaillir au cours de la vie. Notamment par des oublis anodins comme l’endroit où l’on dépose ses clés, ou le contenu de sa liste de course. Ces troubles de la mémoire sont normaux. Ce sont des oublis bénins.

Trou de mémoire bénin

Pour mémoriser, le cerveau doit faire un effort de concentration. Il doit donc être disponible et libéré de toute distraction. Or, les capacités attentionnelles (la faculté à se concentrer) diminuent physiologiquement à partir de 50 ans. Par exemple, un signe normal de vieillissement est d’oublier des noms ou des rendez-vous, mais de s’en souvenir plus tard.

Perte de mémoire soudaine: quels souvenirs s’oublient le plus vite ? 

Dans le cerveau, les souvenirs sont traités dans plusieurs types de mémoire : 

  • La mémoire immédiate retient une information ponctuelle. Pour s’en souvenir, il faut y prêter attention et se concentrer. Autrement, le cerveau la remplace par une information plus pertinente. Par exemple, les noms propres sont des informations faciles à oublier puisqu’il est difficile de les contextualiser sans les relier à une connotation sémantique (une forme, une couleur, un moment, un univers).
  • La mémoire procédurale est celle des automatismes, comme faire de la bicyclette ou conduire… Cela ne s’oublie pas, à condition de continuer la pratique pour garder les réflexes et les procédures en tête. 
  • La mémoire perceptible repose sur les sens. Pour s’en souvenir, il faut cultiver ces souvenirs olfactifs, visuels et gustatifs.
  • La mémoire épisodique ou autobiographique concerne les événements importants, récents ou anciens. Ces souvenirs comme ceux liés à l’enfance sont naturellement imprécis puisqu’ils représentent une période de quantité phénoménale de savoir. Avec l’âge, ce sont ces moments qui s’effacent de la mémoire en premier. 

Quels sont les troubles de mémoire de la maladie d’Alzheimer?

Maladie d’Alzheimer et perte de mémoire

La maladie d’Alzheimer est une démence neurodégénérative connue pour la perte de mémoire épisodique. En touchant progressivement les neurones situés dans le cortex entorhinal et l’hippocampe, la démence affecte la mémoire courte. 

Résultat: le malade souffre de pertes de mémoire répétées et handicapantes au quotidien :  

  • oublier une conversation qui vient de s’achever, son adresse, d’éteindre la cuisinière,
  • oublier des dates ou des événements importants, 
  • demander la même information à plusieurs reprises,
  • utiliser un aide-mémoire (notes de rappel ou dispositifs électroniques)
  • faire appel aux proches pour gérer des choses.

Toutefois, de récentes études* sur l’évolution de la maladie d’Alzheimer montrent une perte de la mémoire sémantique (notre encyclopédie mentale : les souvenirs des mots, des idées, des concepts, etc.) des malades, bien avant l’oubli d’événements passés. 

Perte de mémoire et changement de comportement

Avec une métamémoire affectée, les malades sont inconscients de leurs symptômes. C’est pourquoi ce sont généralement les proches qui remarquent et alertent sur le trouble cognitif. Le patient, lui, a tendance à minimiser les oublis, à cacher les signes de démence et à refuser de consulter. 

avoir conscience de trouble de la mémoire

L’anxiété peut-elle favoriser la perte de mémoire ?

Il existe un lien entre l’anxiété et la perte de mémoire. En effet, les crises d’angoisse pathologique et le stress chronique entraînent une dégénérescence structurelle et une altération du fonctionnement de l’hippocampe et du cortex préfrontal, deux zones clés dans la mémorisation des informations. 

Traiter ces personnes contre l’anxiété pourrait donc atténuer les soucis de mémorisation. Toutefois, il est conseillé d’éviter les antidépresseurs, car certains de ces tranquillisants peuvent avoir un effet amnésiant.

C’est le cas des anxiolytiques (Valium, Lexomil, Xanax, etc.), utilisés pour lutter contre les troubles du sommeil ou l’anxiété. Un effet secondaire qui, sur la durée, pourrait déclencher une maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi leur consommation doit rester ponctuelle et contrôlée par un médecin traitant.

Excepté les traitements prescrits aux patients atteints d’Alzheimer, il n’existe pas de médicament ou d’aliment pour entretenir ou restaurer la mémoire, dont l’efficacité a été prouvée.

Comment distinguer un oubli normal d’un symptôme grave ?

Consulter sa métamémoire

Les enfants me disent que je me répète alors que je ne m’en souviens pas

La répétition involontaire d’information est un signe de trouble léger de la mémoire qui justifie une visite chez le médecin.

Parfois, un état anxieux ou dépressif amplifie la gravité des plaintes.

Il faut distinguer : l’inquiétude pour sa propre mémoire et son fonctionnement réel

précise le neurologue Dr Stéphane Epelbaum

L’inquiétude liée à sa mémoire peut venir de son dysfonctionnement, mais aussi de la compréhension que l’on a de son fonctionnement. Une sorte d’introspection appelée métamémoire, explique-t-il. 

Consulter ses proches

Si aucune plainte de mémoire n’est à négliger, celle qui émane de l’entourage est particulièrement importante. En effet, le rôle des proches est crucial pour distinguer le trouble de mémoire bénin des oublis plus pathologiques, voire d’autres comportements, annonciateurs de problèmes de santé, ou symptômes d’une maladie. 

  • Des pertes de mémoire de plus en plus fréquentes. 
  • Les tâches du quotidien sont difficiles à exécuter (gestion administrative, finance, rangement…).
  • Des changements de comportement brutaux (humeur, dépression)
  • Une perte de raisonnement, des difficultés à planifier. 
  • Des troubles de la parole (difficulté d’articulation et de compréhension des mots).

Afin de rester objectif, interroger ses proches aide à mesurer le degré de gravité de la perte de mémoire.

Que faire en cas de perte de mémoire inquiétante ?

Même si des trous de mémoire sont rarement précurseurs de démence, il est normal de consulter votre médecin traitant en cas d’oublis persistants. Ce dernier peut vous faire passer quelques tests, comme le test de l’horloge ou le test des 5 mots. En fonction des résultats, vous serez dirigé vers une consultation mémoire.

Une consultation mémoire est un test neuropsychologique plus approfondi d’1h30 à 2h effectué par un neurologue gériatre psychiatre. L’analyse se base sur les domaines plus intellectuels, autour du langage, de la gestuelle, de la concentration et de l’environnement.

Comment entretenir sa mémoire et réduire les risques de  démence ?

Entretenir sa mémoire reste l’unique solution pour retarder le syndrome de la perte de mémoire pathologique. Pour cela, favorisez la création de liens et restez attentif aux informations. 

Stimulez votre cerveau régulièrement avec des activités cérébrales et cognitives : 

  • Faire des mots croisés et jouer à des jeux de société ou suivez un programme d’entraînement cérébral.
  • Rédiger ses mémoires, lire.
  • Dessiner, jouer d’un instrument ou écouter de la musique.
  • Se cultiver et cultiver ses relations sociales (se former, apprendre une langue étrangère, etc).
  • Sortir de chez soi, aller à des expositions.
  • Discuter avec ses petits-enfants, toujours curieux et pleins de questions sur vos expériences passées. 
  • Rester actif.
  • Pratiquer une activité physique régulière : travailler sur le système cardiovasculaire évite les lésions dégénératives liées aux troubles de mémoire.
  • Avoir une bonne qualité de sommeil pour consolider les informations.

Si la perte de mémoire peut intervenir à tout âge, s’inquiéter et avoir conscience de ce trouble est plutôt bon signe. Par contre, si l’entourage vous alerte à propos d’oublis et d’autres comportements étranges et inhabituels, écoutez cette personne et demandez l’avis de votre médecin.

Retrouvez l’interview complète du neurologue Dr. Stéphane Epelbaum sur la chaîne Frequence médicale.

Sources : 

https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/troubles-memoire/troubles-memoire-causes/

*https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32815030/

Note de l’article (47 votes)

Cet article vous a-t-il été utile ?

Notez cet article afin de nous permettre d’améliorer nos contenus.

1 Commentaire

Réagissez, posez une question…

  1. Labbe Anne Marie.

    Ces renseignements de santé ont une très grande utilité alors que n avons plus de médecins. Merci à vous.

    Répondre

Les derniers articles

Articles les plus recherchés

Nos dossiers sur ce thème

La santé du Grand-âge

L'accroissement de la longévité s'accompagne de la multiplication de pathologies propres aux personnes âgées. Nous abordons dans ce dossier intitulé "la santé au grand âge"…

En savoir plus

Face à la maladie d'Alzheimer

Nous avons consacré un dossier spécifique à la maladie d’Alzheimer, pour appréhender à sa mesure ce véritable fléau, qui touche en France 800 000 personnes,…

En savoir plus

Face à la maladie de Parkinson

Affection dégénérative du cerveau la plus courante après Alzheimer, la maladie de Parkinson touche plus de 2 % de la population française de plus de…

En savoir plus