L’aide sociale à l’hébergement (ASH) contribue à financer l’accueil des personnes âgées lorsque leurs ressources ne permettent pas d’en couvrir les frais. Malgré les avantages liés à la possibilité d’accéder à une prise en charge adaptée, l’ASH présente plusieurs inconvénients qu’il est important de connaître. Environ un quart des personnes éligibles y renoncent. Cette décision est-elle fondée ? Tour d’horizon des tenants et aboutissants d’une aide départementale parfois critiquée.
À quoi sert l’aide sociale à l’hébergement (ASH) ?
L’aide sociale à l’hébergement (ASH) sert à financer tout ou partie de l’accueil d’une personne âgée (ou handicapée) dans un établissement ou chez un accueillant familial.
Conditions d’éligibilité de l’ASH
Pour être éligible à l’ASH, le demandeur doit remplir plusieurs conditions :
- avoir 65 ans ou plus (ou 60 ans ou plus, en cas d’incapacité au travail) ;
- résider en France de manière stable et régulière (les ressortissants étrangers sont aussi éligibles, à condition de disposer d’un titre de séjour en cours de validité) ;
- disposer de ressources insuffisantes pour assumer (seul ou avec l’aide des obligés alimentaires) les frais d’hébergement.
Il existe aussi une aide sociale à l’hébergement pour les personnes en situation de handicap. Ses conditions et sa mise en œuvre sont légèrement différentes.
La personne âgée peut faire une demande d’aide sociale à l’hébergement, si elle est accueillie
- dans l’une des structures suivantes :
- chez un accueillant familial agréé par le Conseil départemental.
La place occupée par le bénéficiaire de l’ASH doit être habilitée à l’aide sociale. Toutefois, si un senior a résidé à titre payant dans un établissement non habilité pendant au moins cinq ans, il peut demander l’ASH lorsque ses ressources ne suffisent plus à payer son accueil.
Une aide subsidiaire, faisant intervenir l’obligation alimentaire
L’aide sociale, versée par le département, est subsidiaire. Autrement dit, le demandeur doit avant tout avoir recours à d’autres sources de financement avant de solliciter la solidarité collective :
- ses propres ressources courantes et celles de son conjoint,
- l’aide de ses obligés alimentaires.
Les obligés alimentaires sont les descendants et ascendants du résident. Sont également concernés les gendres et belles-filles (sauf en cas de divorce, ou de décès du conjoint créant l’alliance en l’absence d’enfants communs en vie).
Le montant de l’ASH est égal à la différence entre les frais d’hébergement et la participation du résident, de son conjoint et de ses obligés alimentaires.
Concernant les frais d’hébergement couverts, le département y inclut généralement les coûts liés à la dépendance (après participation de l’APA). S’y ajoutent parfois certaines dépenses essentielles (frais de tutelle, complémentaire santé…).
La participation du résident correspond à 90 % de ses ressources courantes, y compris les aides au logement. Une somme minimale de 1 % de l’ASPA annuelle (124 € — en 2025) est laissée à la disposition du résident.
La participation de son conjoint est également fixée à 90 %. Cependant, s’il vit toujours à domicile, le département laisse à sa disposition 1 034,28 € par mois (ASPA mensuelle).
Le Conseil départemental se tourne également vers les obligés alimentaires, qui devront participer en fonction de leurs ressources et de leurs charges.
Par ailleurs, l’ASH est récupérable par le département sur la succession du bénéficiaire ou sur ses ressources s’il « revient à meilleure fortune » (par exemple, s’il hérite de fonds).
Quels sont les avantages de l’aide sociale à l’hébergement (ASH) ?
L’aide sociale à l’hébergement (ASH), comme toutes les aides financières pour personnes âgées, présente plusieurs avantages.
Accessibilité à l’hébergement en maison de retraite
L’ASH permet aux personnes âgées ne disposant pas des ressources suffisantes pour financer leur hébergement en maison de retraite ou chez une famille d’accueil d’y accéder.
Par conséquent, lorsque le maintien à domicile n’est plus possible (ou plus souhaité), la personne âgée peut bénéficier d’une prise en charge adaptée, quelles que soient ses ressources.
Soutien aux seniors dont le patrimoine n’est pas disponible
Le patrimoine non liquide d’une personne âgée (tel qu’un bien immobilier) ne fait pas partie des ressources prises en compte pour fixer l’éligibilité à l’ASH.
En d’autres termes, le droit à l’aide sociale à l’hébergement n’est pas conditionné à la vente d’un bien immobilier ou d’autres actifs non liquides.
Le département avance les fonds nécessaires au financement du séjour, et récupère ensuite les sommes avancées sur la succession du bénéficiaire. L’ASH fonctionne ainsi comme une sorte de prêt à taux zéro.
Pour le senior et ses héritiers, l’avantage est double :
- le résident conserve la propriété de son bien. Après son décès, les héritiers pourront décider s’ils préfèrent vendre la maison ou rembourser l’aide sociale autrement ;
- à la différence d’un prêt viager hypothécaire, le montant de l’aide sociale n’est pas limité à la valeur du bien immobilier. Si celle-ci est insuffisante, le département assume la différence.
Réduction de la charge financière pour les familles
Même si l’ASH est une aide subsidiaire, elle permet néanmoins de réduire la charge financière pesant sur les familles.
En effet, même si les obligés alimentaires sont appelés à participer au paiement des frais d’accueil du senior, leur contribution est limitée à leur capacité financière actuelle. Le reste est pris en charge par le département.
Certes, l’aide sociale est une avance récupérable au décès du bénéficiaire. Toutefois, les sommes récupérées ne peuvent l’être que sur la partie de l’actif net de la succession (c’est-à-dire après déduction des dettes). Par ailleurs, la récupération intervient uniquement si la valeur de l’actif successoral est supérieure ou égale à 46 000 €.
Protection du conjoint survivant
Concernant la résidence principale, le recours en récupération sur succession est différé jusqu’au décès du conjoint survivant, s’il continue à y résider.
Par conséquent, le conjoint peut rester vivre chez lui aussi longtemps qu’il le désire. Il ne peut être contraint à vendre sa maison pour rembourser l’ASH.
Au regard de ces différents avantages, l’ASH est une aide qui joue un rôle important dans la prise en charge des personnes âgées, surtout en cas de perte d’autonomie.
Quels sont les inconvénients de l’aide sociale à l’hébergement ?
L’aide sociale à l’hébergement (ASH) présente toutefois également des inconvénients. Certains sont seulement « apparents » et découlent d’une mauvaise connaissance de son mécanisme et des droits du département.
Toutefois, de très nombreuses personnes âgées et familles choisissent de ne pas demander l’ASH pour différentes raisons. Les inconvénients sont donc souvent un frein à l’accès à la solidarité collective.
Le taux de non-recours à l’ASH s’élève à 25 %. Autrement dit, environ le quart des personnes âgées éligibles à l’ASH, en raison de l’insuffisance de leurs ressources courantes, ne sollicite pas cette aide.
Un reste à charge encore lourd pour les seniors et leurs proches
L’aide sociale départementale est l’une des rares aides aux personnes âgées faisant intervenir l’obligation alimentaire (avec l’ASPA).
Les aides aux logements sont certes accordées sous conditions de ressources. De même, le montant de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) est calculé en tenant compte d’une participation du bénéficiaire liée à ses revenus. Toutefois, aucune de ces aides ne fait intervenir la solidarité familiale.
L’ASH a donc mauvaise réputation auprès des familles des personnes âgées accueillies en maison de retraite.
Pour le résident en maison de retraite et ses proches, le reste à charge reste souvent élevé, surtout lorsque la durée du séjour en établissement est longue. La moitié des résidents séjournent en EHPAD plus de 18 mois et le quart plus de 48 mois. Les sommes déboursées sont donc très importantes.
Les recours en récupération diminuent l’héritage des enfants
L’aide sociale est récupérable sur :
- la succession des bénéficiaires après leur décès,
- les donations accordées après la demande ou dans les dix ans la précédant,
- les fonds que reçoivent les bénéficiaires d’un contrat d’assurance vie, pour la part des primes versées après l’âge de 70 ans,
- le patrimoine financier du bénéficiaire revenu à meilleure fortune.
Le recours en récupération réduit donc l’héritage des enfants, qui ont pourtant déjà participé du vivant de leur parent.
En outre, pour garantir la récupération, le département peut demander l’inscription d’une hypothèque sur un ou plusieurs biens immobiliers du patrimoine du bénéficiaire. Cette hypothèque réduit parfois la valeur d’achat des biens hypothéqués.
Absence de barème national de l’obligation alimentaire
Avant d’accorder l’ASH, les services d’aide sociale départementale font une enquête sur les ressources et charges des obligés alimentaires. Le but : déterminer la contribution que ces derniers doivent verser pour financer l’hébergement de leur parent.
Les départements fixent eux-mêmes leur méthode de calcul de la participation des obligés alimentaires. Seuls quelques-uns publient leur barème, dans le cadre du règlement départemental de l’aide sociale. Mais ce barème de l’obligation alimentaire diffère fortement d’un département à l’autre.
Ainsi, un enfant disposant de 2 000 € de revenu mensuel peut être amené à participer de 200 € chaque mois dans les Pyrénées-Atlantiques ou le Pas-de-Calais. En revanche, s’il vivait dans les Yvelines, il n’aurait rien à payer et ne commencerait à participer qu’à partir de revenus dépassant 2 500 €.
Une intrusion dans la vie privée des familles
La mise en œuvre de l’obligation alimentaire peut être vécue comme une intrusion dans la vie privée des familles
Lorsqu’elle dépose un dossier de demande d’aide sociale à l’hébergement, la personne âgée doit joindre des justificatifs des pensions et salaires de ses obligés alimentaires. Le but : permettre au département d’évaluer leur contribution.
L’administration publique « force » ainsi la personne âgée à demander à ses enfants des informations qui ne sont normalement pas communiquées dans la famille large.
Des risques de conflit au sein de la famille
Par ailleurs, se voir imposer une contribution par le département est parfois mal vécu par les familles. En outre, les gendres et belles-filles ne comprennent pas toujours pourquoi ils sont sollicités pour payer la maison de retraite de la personne âgée.
La question du partage de la contribution peut créer des conflits et des jalousies au sein des familles.
Bon à savoir : le département peut faire une proposition de partage entre les obligés alimentaires, mais ce n’est pas son rôle premier. En réalité, le département est censé évaluer la participation totale de l’ensemble des obligés alimentaires. Ces derniers peuvent ensuite se partager les sommes à l’amiable de manière différente. Lorsqu’ils ne s’entendent pas sur ce partage ou refusent la proposition du service d’aide sociale sans proposer d’alternative, le juge aux affaires familiales peut être saisi pour statuer.
Face à l’impact que peut avoir l’obligation alimentaire sur les relations familiales, de nombreux seniors s’abstiennent de demander l’ASH. Ce non-recours peut entraîner plusieurs problèmes :
- Le senior et sa famille se répartissent les dépenses, mais se privent d’une aide du Conseil départemental. Trouver une place correspondant à leur budget limité peut alors être plus difficile. Pourtant, en l’absence d’héritage, l’ASH ne serait pas récupérée et la charge financière moins lourde.
- Le senior préfère rester à domicile pour ne pas solliciter ses proches. Lorsque la perte d’autonomie s’installe, cette solution peut s’avérer dangereuse ou éprouvante pour les aidants.
La nécessité de trouver une place habilitée à l’aide sociale
Pour pouvoir bénéficier de l’aide sociale à l’hébergement, le résident doit trouver une place habilitée à l’ASH. La quasi-totalité des places installées dans les EHPAD publics sont habilitées à l’aide sociale, mais l’attente est parfois longue. Dans les résidences privées, les places habilitées sont plus rares.
Trouver une place disponible s’avère parfois difficile et si la personne âgée doit être admise en urgence, les choses se compliquent. Par ailleurs, la procédure d’admission à l’ASH peut s’avérer longue. Néanmoins, il est généralement possible de bénéficier de l’ASH d’urgence, laquelle est avancée par le département jusqu’à l’issue de l’instruction du dossier.
Avantages | Inconvénients |
---|---|
Facilite l’accès à un hébergement adapté Permet aux seniors sans ressources suffisantes d’entrer en EHPAD ou en accueil familial | Reste à charge parfois élevé L’obligation alimentaire exige une participation financière des proches, souvent lourde sur la durée |
Ne force pas à vendre le patrimoine Les biens immobiliers ne sont pas pris en compte pour l’éligibilité Le remboursement s’effectue sur la succession | Récupération sur succession Le département récupère les sommes avancées après le décès, réduisant l’héritage des enfants. |
Réduit la contribution familiale Le département complète lorsque les ressources du senior et de ses obligés alimentaires ne suffisent pas | Intrusion dans la vie privée Les obligés alimentaires doivent justifier leurs revenus, ce qui peut être perçu comme un procédé invasif |
Protection du conjoint survivant La récupération sur une résidence principale est reportée tant que le conjoint continue d’y résider | Risques de tensions familiales Le partage de l’obligation alimentaire peut générer conflits, notamment avec les gendres et belles-filles |
Aucune limite de montant Contrairement à un prêt viager hypothécaire, le département finance tous les frais même si la valeur du patrimoine est insuffisante | Inégalité selon les départements Chacun définit son propre barème de l’obligation alimentaire, créant des disparités |
Récupération limitée Le remboursement n’est dû qu’à partir d’une succession de 46 000 € (et après déduction des dettes) | Places habilitées limitées Les places agréés ASH sont plus rares et l’attente peut être longue |
Quelles sont les alternatives à l’aide sociale à l’hébergement ?
Il existe quelques alternatives à l’aide sociale à l’hébergement pour financer l’accueil en EHPAD :
- la location de biens immobiliers inoccupés. Si la résidence principale est vide de toute occupation, il est possible de la louer et de consacrer les loyers au paiement des frais d’hébergement ;
- le prêt viager hypothécaire. Les conditions du prêt viager sont certes moins intéressantes que l’avance à taux zéro que représente l’ASH. Néanmoins, cette option peut être utile pour la personne âgée qui ne désire pas solliciter ses obligés alimentaires ;
- la vente d’un bien. Le département ne peut imposer la vente d’un bien. Toutefois, certaines personnes âgées préféreront recourir à cette solution, parfois là aussi pour éviter de demander de l’aide à leurs enfants ;
- une assurance dépendance. Pour les personnes qui agissent en amont, un contrat de prévoyance dépendance peut servir à financer un accueil en EHPAD en cas de perte d’autonomie.
Source : L’obligation alimentaire, la récupération sur succession et leur mise en œuvre dans le cadre de l’aide sociale à l’hébergement. Rapport du HCFEA. 2020.
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