Souvent associé aux signes d’un rhume ou du coronavirus, aujourd’hui ce symptôme fait les gros titres des médias médicaux en tant que signe avant-coureur de la maladie d'Alzheimer[1]. Les chercheurs de l'Université de Chicago, aux États-Unis, ont récemment confirmé le lien entre l'altération de l'odorat et le risque accru de développer la pathologie neurodégénérative. D'après l'étude publiée en ligne dans la revue “Neurology”, la perte de l’odorat serait un signe Alzheimer[1] avant-coureur.
Alors que la maladie d'Alzheimer demeure sans traitement curatif, les diagnostics précoces jouent un rôle crucial dans la gestion de la démence et l'amélioration de la qualité de vie des patients. Voyons comment la sensibilité olfactive peut servir d'alerte précoce contre la maladie d'Alzheimer[1] avant même l'apparition des symptômes les plus courants, tels que la perte de mémoire.
Pourquoi la perte d’odorat serait-elle le premier signe Alzheimer ?
La maladie d'Alzheimer[1] est une maladie neurodégénérative c'est-à-dire que les symptômes de la maladie d'Alzheimer évoluent de façon progressive. Parmi les plus connus : la perte de mémoire. Cependant, un autre trouble de la reconnaissance est la modification olfactive. Une caractéristique subtile, mais pourtant responsable d'autres perturbations comportementales.
Les causes de l'anosmie chez les patients Alzheimer
L'anosmie est l'incapacité à reconnaître les odeurs. Ce symptôme, souvent évoqué dans les troubles de reconnaissance, résulte des lésions touchant les zones cérébrales impliquées dans les fonctions de mémorisation et d’interprétation.
Il faut savoir que les régions du cerveau responsables de l'odorat sont parmi les premières touchées par la maladie d'Alzheimer[1]. Les protéines bêta-amyloïdes, qui jouent un rôle clé dans le développement de la maladie d'Alzheimer[1], s'accumulent dans ces régions cérébrales, entraînant une détérioration progressive des capacités olfactives et des changements neurologiques sous-jacents.
L'impact d'une perte olfactive sur le comportement
Dans le quotidien d'une personne souffrant de la maladie d'Alzheimer[1], l'anosmie est à l’origine de nombreux troubles comportementaux. En effet, l'incapacité de sentir perturbe sa qualité de vie jusqu`à accentuer son isolement social, ses crises d'angoisse, sans parler de la perte d'appétit et du risque de dénutrition.
De plus, il existe un lien anatomique entre le système olfactif et la mémoire épisodique. L'odorat joue un rôle essentiel dans la perception des repères et de souvenirs. À l'heure de manger, par exemple, les arômes des aliments stimulent les récepteurs olfactifs, ce qui contribue à la sensation de goût. Si la personne est touchée par une perte d'odorat, elle ne ressent plus les saveurs, ce qui peut entraîner une perte d'appétit ou un intérêt réduit pour les repas… Les odeurs sont des repères sensoriels rassurants du quotidien. En plus d’engendrer des troubles de la mémoire olfactive, cette perte sensorielle génère une dépression[4] chez 60 % des patients.
Dépistage précoce d'Alzheimer : quel lien avec la perte d'odorat ?
Dans les faits, 90 % des malades Alzheimer[1] n'ont plus d'odorat au stade avancé de la maladie et 50 % des patients avec un trouble cognitif léger, présentent déjà des troubles d'identification des odeurs.
Ce lien entre la perte d'odorat et le développement ultérieur de la démence a récemment été confirmé par l'étude américaine.
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Les porteurs du gène APOE e4
Si en 2021, des chercheurs chinois et canadiens avaient déjà constaté que les scores de détection des odeurs déclinent chez les sujets atteints de pertes cognitives ou de la maladie d'Alzheimer[1]… Les récentes études de l'université de Chicago prouvent la corrélation entre le trouble de l'odorat et la pathologie, en particulier chez les personnes porteuses d'une variante génétique spécifique, APOE e4.
Après avoir évalué plus de 865 personnes porteuses et non porteuses du gène pendant cinq ans grâce à des tests cognitifs, les chercheurs américains ont pu déterminer si et quand, ce gène affectait le déclin de la sensibilité, de l'identification des odeurs et de la cognition.
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Un dépistage Alzheimer dès 65 ans
Les résultats de l'étude affirment ainsi que les personnes porteuses de la variante génétique associée au risque de maladie d'Alzheimer[1] sont 37% plus susceptibles de perdre leur capacité à détecter les odeurs, et cela des années plus tôt que les personnes non porteuses. Cette anosmie peut survenir dès l'âge de 65 ans, bien avant l'apparition des déficits cognitifs typiques de la maladie.
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En se manifestant des années avant les autres symptômes, l'anosmie devient un indicateur précoce potentiellement précieux pour le diagnostic d'Alzheimer[1].
À noter que la perte d'odorat ne concerne pas seulement l'identification des odeurs, mais aussi la sensibilité olfactive, c'est-à-dire la capacité à détecter les odeurs. Cette altération peut être subtile et passer inaperçue, car les personnes touchées peuvent encore nommer les odeurs sans être pleinement conscientes de leur perte de sensibilité.
“Les déficits de sensibilité aux odeurs chez les porteurs de l'APOE ε4 sont apparus à l'âge de 65-69 ans, alors que les déficits d'identification des odeurs ne sont apparus qu'à l'âge de 75-79 ans”
écrivent les auteurs de l'étude.
En attendant de déterminer le niveau de perte d'odorat prédictif au risque d'Alzheimer[1], cette découverte ajoute de la valeur aux tests de dépistage précoce, car, pour la majorité des patients dépistés, 50% des diagnostics sont effectués à un stade très avancé de la maladie. Ainsi, le médecin pourra diagnostiquer et identifier les personnes à risque dès les premiers stades de la maladie, en testant leur capacité à détecter les odeurs pour prédire les futurs problèmes de cognition.
Pour rappel, la perte d'odorat est également associée à d'autres maladies neurodégénératives, comme la maladie de Parkinson ou la démence à corps de Lewy (qui représente à elle seule 20% des cas de démence en France).
Sources :
Association of APOE ε4 Status With Long-term Declines in Odor Sensitivity, Odor Identification, and Cognition in Older US Adults, Neurology, juillet 2023
Odor identification as a biomarker of preclinical AD in older adults at risk. neurology.org.
– LES BIOMARQUEURS. fondation-alzheimer[1].org.
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[1] Alzheimer
La maladie d’Alzheimer est une maladie qui affecte le cerveau, entraînant des pertes de mémoire et des difficultés à penser clairement, rendant progressivement les tâches quotidiennes plus difficiles.
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[2] AMP
L’AMP (Aide Médico-Psychologique) est un professionnel qui aide les personnes en difficulté, notamment dans les établissements spécialisés, en les soutenant dans leur vie quotidienne et en leur offrant un accompagnement…
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[3] Dénutrition
La dénutrition est un manque de nutriments dans leur alimentation, ce qui peut entraîner une perte de poids, une faiblesse physique et des problèmes de santé chez la personne âgée.
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[4] Dépression
La dépression est un état de tristesse profonde et prolongée, où une personne perd l’intérêt pour les activités et se sent épuisée, qui est très fréquent chez les seniors.
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[5] EHPAD
Les EHPAD sont des établissements médicalisés qui accueillent des personnes âgées qui ont besoin de soins médicaux réguliers et d’une aide dans leur vie quotidienne.
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