Votre proche âgé semble se désintéresser des activités quotidiennes, il se plaint de troubles du sommeil ou de douleurs inexpliquées ? Ces signes sont souvent attribués au vieillissement, à des problèmes de santé ou même à un début de démence. Et s’il s’agissait d’un trouble dépressif ? Découvrez les causes de cette maladie et ses symptômes. Apprenez comment se manifestent les 5 phases de la dépression chez la personne âgée, et de quelle manière aider votre parent.
Qu’est-ce que la dépression de la personne âgée ?
La dépression est un trouble de l’humeur qui peut avoir des conséquences graves chez la personne âgée. Elle se caractérise par une tristesse persistante (humeur dépressive), une perte d’intérêt pour les activités du quotidien et d’autres symptômes causant de la souffrance.
Elle est difficile à reconnaître chez les seniors et reste parfois longtemps sans traitement. En effet, elle peut se manifester différemment et ses signes ne sont pas toujours reconnus comme tels, ni par la personne âgée ni par ses proches.
Les seniors ont tendance à sous-déclarer leurs symptômes dépressifs et à ne pas reconnaître qu’ils se sentent tristes, abattus ou déprimés. En cause : la honte, une méconnaissance du trouble, ou encore la croyance qu’il ne faut pas en parler ni admettre ses difficultés à faire face.
Quelles sont les 5 phases de la dépression chez la personne âgée ?
Certains psychologues décrivent la dépression et sa prise en charge comme un processus évolutif en plusieurs étapes.
La version la plus connue évoque cinq phases – de la période pré-dépressive jusqu’à la guérison. Elle s’inspire de la classification de Fava et Cosci (2013), qui ont proposé un modèle en cinq stades de la dépression unipolaire.
Selon cette version, les 5 phases de la dépression chez la personne âgée sont les suivantes :
Phase 1 : la phase préliminaire ou pré-dépressive
La phase pré-dépressive est celle des signes avant-coureurs qui annoncent la survenue d’un épisode dépressif.
Il s’agit de changements subtils qui peuvent passer inaperçus. Des symptômes d’anxiété et de dépression commencent à apparaître, mais ils sont encore légers et peu spécifiques.
Les premiers symptômes de dépression chez la personne âgée
Les premiers signes de dépression chez la personne âgée sont notamment les suivants :
- Symptômes émotionnels :
- anxiété ;
- angoisse ;
- irritabilité ;
- tension ;
- tristesse ;
- perte d’intérêt pour certaines activités ;
- perte du plaisir lié à des activités autrefois appréciées (anhédonie) ;
- Symptômes physiques :
- troubles du sommeil (insomnie, réveil précoce) ;
- fatigue ;
- lassitude et manque d’énergie ;
- altération de l’appétit (qui peut être réduit ou, au contraire, accru) ;
- douleurs et courbatures (tête, dos, poitrine, jambes…) ;
- Symptômes cognitifs :
- indécision ;
- concentration altérée,
- troubles de la mémoire ;
- inquiétude ;
- diminution de l’estime de soi ;
- Symptômes psychomoteurs :
- agitation ;
- lenteur des mouvements, qui se manifeste par une démarche plus lente, mais aussi une voix plus faible.
Ces signes peuvent précéder un épisode dépressif majeur de quelques semaines à plusieurs années (Benasi et coll., 2021). Chez la personne âgée, la dégradation de l’humeur peut être plus rapide.
Conseil aux aidants : reconnaître une dépression naissante
Ces premiers symptômes sont souvent confondus avec ceux de la démence. En fait, la maladie d’Alzheimer et les autres troubles neurodégénératifs peuvent eux-mêmes être à l’origine de la dépression.
À ce stade, il est important de bien décrire les symptômes que vous constatez chez votre proche pour aider le médecin à poser le bon diagnostic.
N’oubliez pas d’évoquer les conditions dans lesquelles ils sont apparus. S’ils surviennent après une perte ou un autre événement difficile, il est fort probable qu’ils signalent une dépression. Apprenez plus bas à reconnaître les causes de dépression chez un proche âgé.
Phase 2 : phase ascendante d’intensification des symptômes
Peu à peu, les symptômes s’intensifient et persistent plus longtemps. Ils commencent à avoir un effet négatif sur le quotidien de la personne âgée.
Vous pouvez alors constater que votre proche se replie sur lui et refuse de sortir de son domicile. Il cesse d’accomplir de nombreux gestes du quotidien, y compris ceux liés à l’hygiène. Il ne participe plus aux activités habituelles et s’isole.
Son humeur dépressive est de plus en plus marquée, avec un pessimisme croissant et un sentiment de culpabilité.
Phase 3 : phase aiguë ou épisode dépressif majeur
L’épisode dépressif se manifeste dans toute son ampleur, avec des symptômes significatifs qui durent pendant plusieurs semaines, voire plus.
Les changements d’humeur et de comportement peuvent être variés :
- refus de sortir du domicile ;
- refus de s’alimenter ;
- accumulation compulsive ;
- consommation excessive d’alcool
L’épisode de dépression majeure peut aussi se traduire par les signes suivants :
- préoccupation soudaine concernant le testament ;
- dons d’objets personnels ;
- idées noires ;
- sentiment que la vie n’a plus d’intérêt ;
- propos récurrents sur la mort ou le suicide ;
- intérêt inhabituel pour les armes blanches ou à feu.
Le risque suicidaire chez le senior déprimé
Ces comportements doivent vous alerter non seulement sur la possibilité d’une dépression, mais aussi d’un risque suicidaire (Anesm, 2014).
Au grand âge, le passage à l’acte est favorisé par plusieurs facteurs :
- isolement :
- conflits familiaux,
- état de santé dégradé,
- ruptures (perte du conjoint ou d’un animal de compagnie, déménagement…),
- précarité financière.
La nécessité d’un diagnostic rapide de la dépression
Si vous constatez des symptômes évocateurs de dépression chez votre proche âgé, il est important de l’encourager à consulter un professionnel de santé.
Le médecin traitant utilise souvent un outil de dépistage appelé la GDS (Geriatric Depression Scale) pour évaluer la situation de la personne âgée. Il peut aussi recourir à une version simplifiée, la mini-GDS, qui comporte seulement 4 questions sur le ressenti de votre proche au cours des derniers jours.
Le diagnostic de dépression est posé lorsque l’humeur dépressive et la perte d’élan de vie persistent depuis au moins deux semaines, avec d’autres symptômes causant une souffrance.
Phase 4 : la phase de rémission
L’épisode dépressif peut passer de lui-même en quelques mois. Néanmoins, la plupart des patients ont besoin d’un traitement adapté pour atteindre une véritable rémission.
Traitement de la dépression de la personne âgée
Il existe plusieurs approches thérapeutiques pour traiter la dépression chez les seniors :
- Un traitement antidépresseur est généralement nécessaire. Le choix du médicament spécifique dépend notamment de la sévérité des symptômes, des autres maladies de votre proche et des médicaments qu’il reçoit déjà. Chez les seniors, les antidépresseurs peuvent mettre plus longtemps à agir. Il faut souvent attendre six à huit semaines avant d’en évaluer pleinement l’efficacité.
- Une psychothérapie est associée au traitement médicamenteux. On recourt généralement à la thérapie cognitivo-comportementale (TCC). Il est important de choisir un thérapeute qui tiendra compte des limites sensorielles (troubles de la vue ou de l’audition) et physiques de votre proche.
- L’électroconvulsivothérapie est aussi une option utile pour les épisodes dépressifs sévères. On l’utilise notamment en cas de dépression résistante, lorsque les médicaments se révèlent inefficaces.
D’autres interventions peuvent également aider à soulager les symptômes dépressifs :
- activités sociales ;
- exercice physique régulier ;
- musicothérapie.
Le soutien des aidants au cœur du traitement
Votre capacité à soutenir votre proche pendant cette période joue un rôle important dans ses chances de rémission. Encouragez-le à suivre son traitement et à participer aux activités susceptibles de l’aider à retrouver goût à la vie.
Bon à savoir : si votre proche réside en maison de retraite, le personnel de l’établissement peut également être mis à contribution. L’animateur établira un programme afin de le stimuler et les aides-soignants l’accompagneront pour sortir de sa chambre. Le psychologue de l’Ehpad, de son côté, peut assurer ou coordonner des séances de psychothérapie régulières.
Phase 5 : la phase de rétablissement et de prévention des récidives
La phase de rétablissement intervient lorsque le senior a retrouvé ses activités habituelles et sa place dans la société.
Ce rétablissement fonctionnel va plus loin que la simple disparition des symptômes.
Le traitement antidépresseur est souvent maintenu pendant au moins 4 à 12 mois pour atteindre une véritable guérison. Mais c’est la psychothérapie qui permet un retour à la normale. Elle se concentre sur le bien-être et la qualité de vie de la personne âgée. Le but : prévenir les récidives et surtout l’installation d’une dépression chronique.
Quelles sont les causes de la dépression chez la personne âgée ?
Les causes de la dépression au grand âge sont multiples. Elles peuvent être d’ordre physique, psychologique ou social.
Mauvaise santé et dépression
Différents problèmes physiques peuvent provoquer ou aggraver une dépression :
- cancers ;
- affections thyroïdiennes ;
- carences en vitamines ;
- certaines infections ;
- maladie cérébrovasculaire (AVC).
Maintes maladies chroniques entraînent des handicaps permanents qui limitent la mobilité. Le senior a alors besoin d’aide pour les gestes de la vie quotidienne.
Cette situation peut entraîner des pensées favorisant la dépression :
- perte de dignité ;
- sentiment de dépendance ;
- peur de devenir un fardeau pour les proches ;
- crainte d’une entrée en maison de retraite.
En outre, plusieurs médicaments peuvent favoriser ou aggraver la dépression. Les plus concernés sont les suivants :
- corticoïdes (anti-inflammatoires souvent prescrits contre les rhumatismes) ;
- opioïdes (antalgiques puissants comme le tramadol) ;
- certains anciens bêta-bloquants (antihypertenseurs) ;
- benzodiazépines (tranquillisants).
Isolement et moral du senior
Les problèmes de santé et la perte d’autonomie sont parfois aggravés par l’isolement social et la solitude.
En cause : le manque de liens familiaux étroits ou la difficulté à participer à la vie locale (mobilité réduite, absence de transports).
Cet isolement a un effet sur le moral et accroît les risques de dépression.
Pertes et ruptures au grand âge
Les pertes et ruptures fragilisent aussi l’équilibre psychologique et peuvent favoriser l’apparition d’une dépression.
De nombreux aînés parviennent à faire face à des épreuves telles que :
- le décès d’un conjoint, d’amis et de proches, ou d’un animal de compagnie ;
- la perte d’indépendance ou de santé ;
- le changement de domicile et de mode de vie.
Mais pour d’autres, ces événements peuvent déclencher des symptômes dépressifs.
Une période de deuil après une perte est normale. Cependant, un diagnostic de dépression doit être envisagé lorsque :
- les symptômes persistent au-delà de trois à six mois ;
- ils provoquent une détresse sévère et affectent le comportement de votre proche au quotidien.
Identifier ces causes permet de mieux reconnaître la dépression et d’adapter le traitement.
Comment aider un parent dépressif ?
Le chemin vers la guérison peut être long pour votre parent dépressif et votre soutien est important. Mais, vous ne pouvez l’aider que s’il accepte de se faire soigner, même s’il ne le fait pas de toute gaîté de cœur.
Le problème avec la dépression, c’est qu’elle prive souvent l’individu de l’envie même d’agir pour se sortir de sa situation. Dès lors, comment l’aider ?
Communiquez avec empathie
Il est important d’écouter les inquiétudes de votre parent et de le laisser se confier. Soyez patient, tout en essayant de le guider peu à peu vers la décision de se faire aider.
Faites les premiers pas
Vous ne pouvez certes pas contraindre un proche à consulter un médecin et encore moins un psychologue. Mais vous pouvez lui faciliter la tâche, notamment en l’aidant à chercher un spécialiste et en fixant le premier rendez-vous. Vous pouvez parler au médecin en amont et présenter la situation.
Envisagez la télémédecine
Parfois, votre proche sera plus enclin à parler à un thérapeute à distance, car il n’a ni la force ni l’envie de sortir de chez lui. Depuis la crise sanitaire de la COVID-19, de plus en plus de psychologues sont prêts à suivre un patient grâce à la télémédecine.
Stimulez et entourez votre proche
Dès les premiers signes de déprime et de repli sur soi, surtout après un événement difficile, tentez de renforcer vos visites. Mettez éventuellement en place l’intervention d’une aide à domicile pour briser l’isolement et l’aider à préparer des repas. Si possible, venez manger avec votre proche et tentez de le motiver à participer à des activités.
À la phase aiguë, il sera plus difficile de le stimuler. Mais dès que vous observez un début de rémission, organisez des sorties ou renforcez les visites, pour éviter une rechute.
Envisagez un accueil en maison de retraite
Si la dépression survient après une perte, un séjour temporaire en maison de retraite peut être bénéfique. Votre proche y bénéficiera d’une vie sociale plus riche et d’un accompagnement continu par des professionnels formés.
Attention, toutefois, de ne pas renforcer le sentiment de rupture. Parlez-en au médecin traitant et, surtout, à votre parent.
Grâce à votre soutien, votre parent déprimé peut surmonter cette période difficile. L’âge n’atténue pas l’efficacité des traitements. Avec une prise en charge et un suivi adaptés, la guérison est possible.
Questions fréquentes
Combien de temps dure chaque phase de la dépression chez un senior ?
La durée de chaque stade dépend de chaque individu, de son histoire de vie et de la vitesse à laquelle il est pris en charge. D’après l’Inserm, un épisode dépressif peut durer entre 6 et 12 mois, sans traitement. Les antidépresseurs permettent à un patient sur 3 d’atteindre une rémission totale des symptômes en 8 semaines.
Existe-t-il des groupes d’entraide pour la personne déprimée ou ses aidants ?
De nombreuses associations existent pour soutenir à la fois le patient et ses proches. La plus connue, avec des antennes dans plusieurs départements, est France Dépression (tél. : 07 84 96 88 28). Des groupes de parole et des associations spécifiques pour les seniors et leurs aidants existent, notamment France Alzheimer. Renseignez-vous auprès du CCAS de votre commune.
Sources :
Anesm. 2014. Prise en compte de la souffrance psychique de la personne âgée : prévention, repérage, accompagnement. Recommandations de bonnes pratiques professionnelles (personnes âgées).
Benasi, G., Fava, G. A. et Guidi, J. (2021). Prodromal symptoms in depression: a systematic review. Psychotherapy and psychosomatics, 90(6), 365-372.
Cosci, F. et Fava, G. A. (2013). Staging of mental disorders: Systematic review. Psychotherapy and Psychosomatics, 82(1), 20–34.
Inserm. 2019. Dépression. Mieux la comprendre pour la guérir durablement. En ligne.
Otto, M. W. et coll. (2022). Stage models for major depression: Cognitive behavior therapy, mechanistic treatment targets, and the prevention of stage transition. Clinical psychology review, 95, 102172.
Cet article vous a-t-il été utile ?
Notez cet article afin de nous permettre d’améliorer nos contenus.
Réagissez, posez une question…